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était datée du 22 décembre. On y laissait pour la première fois entrevoir la possibilité d’un nouvel examen de ces mêmes lois de Mai au sujet desquelles, depuis la rupture des pourparlers de Kissingen, le cabinet de Berlin avait toujours refusé d’accueillir les observations du Vatican. Désormais l’éventualité d’une révision de ces lois était admise ; mais l’Empereur la subordonnait à la reconnaissance implicite par Rome de celle de ces lois qui concernait la notification au pouvoir civil par les évêques des nominations aux emplois ecclésiastiques. Or, l’ensemble de la législation prussienne de 1872 à 1875 en matière de religion constituait un réseau à mailles tellement serrées que l’Eglise catholique, qui aurait dû, selon les prévisions humaines, y périr étouffée, ne pouvait maintenant entrer à cet égard dans la voie des transactions, sans être au préalable fixée sur la nature et la portée des arrangemens que le cabinet de Berlin proposait pour témoigner son sincère désir de mettre fin au Culturkampf.

En cédant tout de suite sur la question de la notification obligatoire (Anzeigepflicht) des emplois ecclésiastiques, le Saint-Siège aurait concédé à titre gratuit à la Prusse un avantage considérable. Du coup, en effet, le pouvoir civil aurait été mis en mesure de désarmer le mécontentement des populations catholiques, dans les nombreuses paroisses privées de leurs curés depuis plusieurs années. Cependant les membres du clergé, à tous les degrés de la hiérarchie, seraient restés sous le coup de la loi concernant la formation des clercs, comme de celle qui les soumettait à la juridiction de la haute cour ecclésiastique. On en serait revenu ainsi, en attendant la révision que l’Empereur laissait espérer, — mais dont l’urgence, au point de vue du gouvernement prussien, eût cessé d’être bien pressante, — au modus Vivendi que M. de Bismarck avait, en 1878, à Kissingen, offert au nonce de Munich.

D’ailleurs la presse officieuse, en Allemagne, ne manquait pas de signaler l’attitude invariablement résolue de la fraction du Centre dans le Reichstag, de même qu’à la Chambre des députés de Prusse, comme le seul véritable obstacle à la réconciliation entre le Vatican et Berlin. Les vrais intérêts de la religion étaient, au dire des avocats de la politique du prince de Bismarck, sacrifiés aux rancunes de M. Windthorst et de ses amis. Tel n’était pas le sentiment dominant au Palais apostolique. On y estimait que, sans la fermeté du Centre, l’Eglise eût été en Allemagne dans une situation infiniment plus dangereuse que partout ailleurs,