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POESIE

LE LIT CLOS


D’abord cet humble lit ne me dit pas grand’chose.
A parler franchement, il n’était pas trop beau
Avec son coffre usé qui servait d’escabeau,
Et ses rideaux fanés de percaline rose.

Mais il avait un air d’extrême honnêteté !
Puis, tout paraît charmant à celui qui navigue...
En dépit de son âge, il tenta ma fatigue,
Et je m’applaudis fort lorsque j’y fus monté.

Ah ! le cher lit, cassé comme un bon patriarche,
Confortable pourtant, moelleux, presque douillet !
Les rudes draps, fleurant la lavande et l’œillet !
L’oreiller du repos, si doux après la marche !

On est là comme un moine en son petit couvent ;
Rien ne vous pèse plus des choses de ce monde ;
Et, le cœur endormi dans une paix profonde.
On écoute au dehors tourbillonner le vent.

La mer, à quelques pas, déferle sur la grève.
Et son chant monotone et large vous poursuit.
Elle parle plus franc au tomber de la nuit ;
En cet abri rustique on comprend mieux son rêve.