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l’artiste, tout en se conformant au programme qui lui avait été tracé relativement à la détermination des sujets, entendait bien conserver autant qu’il le pourrait toute sa liberté pour leur exécution.

Avec une franchise amicale, Peiresc, ainsi qu’il l’avait promis, communique à Rubens ses observations sur les compositions projetées. Dans une lettre datée du 25 septembre, il lui rappelle qu’il assistait à Florence (le 5 octobre 1600) au mariage par procuration de Marie de Médicis avec Henri IV. « J’ai vu avec plaisir, lui dit-il, que vous étiez aussi présent aux épousailles de la reine mère à Sainte-Marie-des-Fleurs et dans la salle du Banquet. Je vous remercie de m’avoir remis en mémoire l’Iris qui comparut à la table, avec cette Victoire romaine en habit de Minerve et qui chanta avec tant de douceur. Je regrette beaucoup que nous n’ayons pas à ce moment-là contracté ensemble cette amitié qui nous lie maintenant. » Discutant certains détails introduits par l’artiste dans ce tableau, il lui signale comme inexacts le groupe de la Pietà qui domine la scène et le chapeau de cardinal posé sur l’autel ; mais Rubens dans sa réponse maintient la véracité de ces détails qui étaient restés gravés dans sa mémoire.

Peu de temps après, vers la fin de novembre 1622, les quatre premiers cartons de l’Histoire de Constantin étant terminés, Rubens les avait envoyés à Paris. Peiresc, à la date du 1er décembre, s’empresse de lui communiquer l’impression qu’ils ont produite sur ceux qui les ont vus : « MM. de Loménie, de Fourcy, de Saint-Ambroise, de la Baroderie, Jacquin et Dunot, qui sont presque tous de ceux que le roi charge de l’inspection des travaux publics. » Comme Peiresc avait été mis au courant par l’artiste des détails des sujets traités par celui-ci, il a pu leur expliquer ses intentions. D’autres personnes étant survenues, entre autres l’archevêque de Paris, les spectateurs ont échangé entre eux leurs observations. Ils ont été unanimes à louer la « profonde connaissance des costumes antiques et l’exactitude avec laquelle ils ont été rendus, jusqu’aux clous des chaussures. » Cependant plusieurs critiques ont été faites sur la pose de certaines figures, notamment sur la façon dont leurs jambes sont arquées. Tout en défendant de son mieux son ami auquel il a entendu vanter « la belle courbure des jambes du Moïse de Florence et du saint Paul », Peiresc n’est pas éloigné de partager l’opinion généralement exprimée par les assistans que, « si c’est là l’effet de quelque défaut ou une particularité nationale,