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exterminations immenses inséparables alors des victoires remportées sur les Francs, les Alamans et les Goths, ils ne répugnaient pas à voir couler le sang. A leur tour, ils cherchaient à maintenir, avec l’intégrité du territoire, l’unité religieuse qui faisait aussi partie du programme de Rome. Pour la plupart, ils persécutaient les chrétiens, n’admettant pas, comme soldats, qu’on refusât de sacrifier aux enseignes et aux aigles, ces dieux propres des légions. Mais en attendant qu’ils reconnussent que, seul, le christianisme était capable de remplacer les autres religions, l’empire, entre leurs fortes mains, reprenait par momens ses anciennes frontières et, de nouveau, sa figure remplissait le monde. Il était comme les édifices construits à la même époque et qui restent imposans. Car si, au fond, ils portent la trace d’une décadence fatale, les dispositions générales en sont dignes du passé et, tout au moins, l’aspect en est grandiose.

Aurélien, qui devait achever d’abattre les derniers des trente tyrans et rendre à l’autorité impériale ses prérogatives, n’admettait pas que Zénobie revendiquât pour elle les dignités et les droits conférés à son mari. Restaurateur de l’unité romaine, il ne pouvait tolérer que Wahballath prît le titre d’Auguste, que sa mère le conservât et prétendît s’en autoriser pour fonder un État indépendant. Mieux que l’histoire écrite, les monnaies latines et surtout les grecques, nous font assister aux hésitations qui, de la part de la famille d’Odeynath, précédèrent la rupture dont la ruine de Palmyre devait être la conséquence. D’abord Wahballath ne veut point frapper de monnaies. Après trois ans, il se décide à le faire, mais alors il prend simplement les premières qualités dont son père ait été revêtu : celles d’empereur et de général des Romains (269-270). Il considère encore l’empereur de Rome comme son suzerain. Puis il figure d’un côté, sur les différens types monétaires, avec la tête laurée et radiée, tandis que, sur l’autre face, on voit le profil d’Aurélien lauré. Ensuite les têtes des deux personnages sont affrontées, Wahballath portant le diadème et Aurélien la couronne de laurier. Il ne se qualifie pas encore d’Auguste, mais cependant il paraît se poser en collègue. Enfin, pendant la cinquième année de son règne, Wahballath prend son parti : la tête laurée, il paraît seul sur les monnaies comme Auguste ; on est en 271. A partir de ce moment, c’est la révolte, c’est la guerre.

Elle éclate bientôt. Aurélien, après avoir pacifié le centre de