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LES LUTTES ENTRE L’ÉGLISE ET L’ÉTAT.

cien régime, armes de la révolution, armes des rois, armes des démagogues, armes des âges chrétiens, armes des années athées, tout ce qui avait été forgé, fourbi, aiguisé contre l’Église fut découvert, recueilli, inventorié, mis en état par cet incomparable collectionneur d’arbitraire. Il tenait à ce point à ces droits que, pour les acquérir, il ne recula pas devant un acte de surprise et de déloyauté. Après avoir, en négociant avec le pape, reconnu que les difficultés pendantes entre l’Église et l’État devaient être réglées par traité, que rien donc ne pouvait être résolu sauf d’un commun accord, il promulgua de sa seule autorité, sous le nom d’Articles organiques, le code des prétentions de tout temps odieuses à la papauté, celles qu’il avait en vain essayé de lui imposer, celles qu’il n’avait pas osé lui soumettre.

Ce régime n’était pas pour satisfaire l’Église. Si elle en examine la légitimité, elle voit à l’origine même, dans les articles organiques, la fraude : la fraude plus odieuse quand, maniée par un Napoléon contre un Pie l’II, au lieu d’être la ressource de la faiblesse contre la force, elle achève le faible par la perfidie du fort. Si elle en interroge le dessein, elle le trouve illogique : l’État croit-il la religion funeste, pourquoi l’a-t-il rétablie ? La croit-il salutaire, pourquoi l’affaiblit-il par toutes les jalousies de l’arbitraire ? Si elle s’interroge elle-même, elle souhaiterait un État qui tint à devoir non seulement de ne pas la contraindre, mais de la servir. Les ennemis de l’Église n’avaient pas plus lieu de triompher. Des incrédules persuadés que la foi est une superstition et la superstition une déchéance pour l’individu et la société, que l’unique rapport entre l’État et l’Église doit être celui de juge à prévenu, de geôlier à captif, de spoliateur à spolié, de proscripteur à banni, ont motif pour faire grief à la puissance publique d’avoir traité avec l’erreur d’égal à égal, de lui avoir signé des lettres de naturalisation en France. Ceux enfin pour lesquels l’essentiel n’était ni l’intérêt de l’Église, ni celui de l’irréligion, mais celui de la liberté promise en 1789, condamnaient également les faveurs rendues au catholicisme et les servitudes maintenues contre lui. Si les deux puissances, distinctes par le domaine, les moyens d’action, le but, ne peuvent sans usurpation ni dommage se concéder de droits l’une sur l’autre, et si leur état naturel est la séparation, des théoriciens ne sauraient admettre ni que par un corps de fonctionnaires ecclésiastiques, le gouvernement soutienne auprès des populations la candidature officielle du