Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 142.djvu/910

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’ENSEIGNEMENT PRATIQUE DE L’AGRICULTURE
DANS L’ÉCOLE RURALE

Durant de longues années, l’agriculture fut prospère en France. Il était inutile de l’enseigner : on la savait. Ce qu’il nous plaît aujourd’hui, grands savans que nous sommes, d’appeler la « routine », était un art discret né de pratiques séculaires et enrichi des fruits de l’expérience. On ne demandait à la terre que ce qu’elle peut produire naturellement en lui rendant à peu près tout ce qu’elle avait donné et en se confiant pour le surplus à la générosité providentielle. Avec dix-sept hectolitres de blé à l’hectare, l’agriculteur se tirait d’affaire ; et s’il pouvait y ajouter quelques graines industrielles, quelques cultures spéciales, quelque bon pâturage, quelques centaines de moutons, il gagnait assez d’argent pour arrondir le domaine héréditaire, pour élever ses enfans et placer dans sa cave quelques bonnes bouteilles de vin de la Bourgogne ou du Bordelais. La vie était facile et plantureuse pour la moyenne culture ; elle était opulente pour la grande ; et la petite trouvait avantage à ne pas abandonner la profession paternelle pour chercher dans les villes ou dans les usines un bien-être moins assuré.

Mais quand les produits étrangers trouvèrent les frontières ouvertes et rendirent difficiles ou sans profit la culture du lin, du colza, du chanvre, la vente des soies, des laines et du vin commun, il fallut bien demander à la terre des compensations. On les trouva dans le développement de l’élevage, dans la culture de la betterave, alors favorisée ; on les demanda surtout à une production plus abondante des céréales. Un moment le blé fit fortune. On reporta sur lui des soins et des efforts dispersés auparavant sur les cultures sarclées : on introduisit dans les