tres n’exclut pas le respect qui leur est dû. J’en ai conclu que l’esprit de justice règne dans la maison, que le jeune homme qui vient y puiser l’instruction y rencontre aussi l’éducation, et que la liberté de sa pensée n’est limitée que par une raison soumise et bien dirigée.
L’histoire de l’Institut de Beauvais mériterait une monographie à laquelle on ne saurait donner place ici. Il nous suffira de rappeler qu’il fut ébauché en 1854 par le F. Menée et qu’au début, nous trouvons parmi les noms de ses protecteurs ceux de MM. Alexis et Édouard de Tocqueville, à côté de celui de Louis Gossin, un agronome modeste, mais d’une valeur incontestée. De 1864 à 1893, le successeur du F. Menée fut le F. Eugène-Marie. Un mot suffira pour le peindre dans son jour de savant et d’administrateur : s’il n’avait été l’esclave de son devoir et de sa robe, il eût été le meilleur directeur de l’agriculture que la France eût connu. Pour le peindre en sa personne, il faudrait la plume d’un humoriste de premier ordre. Par sa bonhomie, sa franchise, son humeur vaillante et toujours sereine, autant que par son savoir étendu et profond, le F. Eugène-Marie était un de ces types rares qui font figure partout et ne soulèvent sur leur passage qu’estime et sympathie. L’homme fut pour beaucoup dans l’essor que prit sous sa direction la maison de Beauvais. Il trouva le secret rare de fixer sur un établissement libre et religieux la faveur du public et du pouvoir. En même temps qu’il appelait à lui les fils de famille de la contrée, il conquérait sans effort le suffrage de M. Drouyn de Lhuys et la bienveillance de l’empereur. Un subside léger mais efficace lui fut assuré ; l’administration préfectorale signait les brevets et diplômes et leur donnait ainsi un caractère officiel. Le nombre des élèves augmenta et permit le développement pratique de l’enseignement par l’adjonction d’une petite ferme et bientôt après d’une grande. Outre ces deux fermes où l’élève met lui-même la main à la charrue pour en mieux connaître l’action, le successeur du F. Eugène-Marie, le F. Paulin, y a tout dernièrement ajouté un moulin qui ne se contente pas de moudre le blé : il distribue la lumière électrique à l’établissement. Aujourd’hui, l’enseignement agricole est complet dans toutes les branches de la grande et de la petite culture, dans l’horticulture, l’élevage, et jusque dans les principales industries agricoles.
Malgré les services rendus, le vent de la politique — qu’avait-elle à faire ici ? — tourna un jour contre cette école modèle. Le patronage officiel lui fut retiré en 1884. Inutile d’ajouter que le petit subside avait disparu : l’Institut n’en avait plus besoin. Il changea seulement de protecteur. La Société des Agriculteurs de France se substitua à