Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 144.djvu/644

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui s’y perd. Après une fougueuse jeunesse, la Loire coule, dans l’isolement, une triste existence ; les affluens tourangeaux et angevins sont pour elle des amitiés bénies, mais tardives, qui, au déclin de ses forces, la soutiennent jusqu’à sa fin où elle a couru sans détours.

Le débit du fleuve ne peut donc être qu’inconstant. Il varie de 1 à 200[1]. L’écart, pour la Seine, n’est que de 1 à 31 ; pour le Rhône de 1 à 22 ; et pour la Somme de 1 à 2, 7 seulement. Le débit oscille entre de et 3 000 mètres cubes à Pinay (entre le Forez et Roanne) ; les crues à Nevers peuvent donner 6 000 et 7 000 mètres cubes, trois fois autant que la Seine à Paris dans l’inondation de 1876 ; mais à Briare l’écart est de 9 000 à 30 mètres ; à Orléans de 6 500 à 25, moins que la Seine, en amont de Charenton, dans les sécheresses extraordinaires. Cette pauvreté du fleuve dans le Val s’explique aisément par la nature du lit, entièrement percé de trous[2]. En aval du Cher, l’étiage permet souvent de naviguer : 52 mètres cubes ; il s’élève à 72 mètres au confluent de la Vienne, à 127 à celui de la Maine[3]. C’est surtout entre Briare et Tours

  1. De même pour les affluens : l’écart entre l’étiage et les crues est, pour le Cher, de 16 mètres cubes à 1 690 ; pour l’Indre, de 5 300 litres à 340 mètres ; pour la Vienne, de 19 mètres à 2 600 ; pour la Maine, de 18 à 1 500.
  2. Tous les ans, le lit s’effondre en certains points ; l’eau s’y engouffre ; ailleurs, au contraire, elle revient par là. En 1841, 1 300 mètres cubes disparurent. En 1871, un gouffre de 3m,50 de diamètre et de 12 mètres de profondeur s’ouvrit à Orléans et resta béant quelques semaines. Dans l’hiver rigoureux de 1880, les eaux souterraines tièdes venaient bouillonner à la surface du fleuve, l’empêchaient de geler et produisaient des vapeurs. Les premières pertes ont lieu au hameau de Bouteille (41 kilomètres amont d’Orléans) ; les eaux reviennent à 9 kilomètres en aval d’Orléans par des rentrées de fond et par le Loiret, simple dérivation du fleuve. Les jaugeages le montrent bien : le 5 décembre 1859, la Loire débitait 42m,30 à Bouteille, 30m,80 en amont du Loiret, 45 en aval ; le 22 août 1864, les débits étaient de 40, de 32m,60 et de 47m,90 ; le 20 octobre 1865, de 48m,20 de 35m,90 et de 46m,50. Le point le plus mauvais est toujours Orléans : le débit y est souvent plus petit d’un tiers qu’en aval du Loiret. Sans cette ville il faudrait ouvrir un canal de Bouteille au Loiret, par la vallée de la Dhuis : la navigation serait plus sûre et plus courte.
  3. Les profondeurs minimum et moyenne sont de 0m,20 et 0m,50 entre Roanne et Briare ; de 0m,25 et 0m,70 entre Briare et la Vienne ; de 0m,45 et 1m,50 entre la Vienne et la Maine ; de 0m,70 et 1m,75 entre la Maine et Nantes ; de 2m,50 et 4m,50 en aval de Nantes. D’une manière générale, on calcule que la profondeur de 1m,50, minimum nécessaire à la navigation, manque 251 jours par an entre Briare et la Vienne, et 186 entre la Vienne et la Maine. Les crues arrêteraient la navigation vingt-cinq jours. Le chômage. du fait des eaux (indigence, glaces, crues), serait de 267 jours entre Briare et le Cher, 170 entre le Cher et la Vienne, 40 entre la Vienne et la Maine, 101 entre la Maine et Nantes. Qu’on ajoute à cela les brouillards Jusqu’à 35 jours à Blois, les vents contraires (de 130 à 188 jours) ou trop faibles (15 jours).