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comme excuse de son insolvabilité, la survenance d’accidens fortuits ; d’autres demandèrent que toute clause par laquelle le métayer s’engagerait à payer certains impôts légitimement dus par le propriétaire fût, à l’égard du droit, regardée comme non existante ; plusieurs souhaitèrent, pour mettre un terme à certains parasitismes, que les adjudicataires de l’exploitation d’un domaine ne pussent être choisis, légalement, que dans la classe des agriculteurs ; on émit aussi l’idée que les contrats de trop courte durée, qui déconcertent le bon vouloir du paysan et le mettent à la discrétion du propriétaire, devraient être prohibés ; tous, en un mot (et nous en pourrions multiplier les exemples), se préoccupaient de rapprocher, autant que possible, les limites de la légalité et les limites de l’équité, et de condamner, sous le verdict inquisiteur de la légalité, certains détails de contrats qui sont des affronts à l’équité. Même, la minorité de la commission, en tête de laquelle figurait M. Nitti, voulait que l’Etat fixât certains types de contrats légaux, entre lesquels les propriétaires devraient forcément opter, et qu’ainsi, non content d’énumérer les abus que le consentement apparent des deux contractans ne suffirait plus à justifier, le pouvoir public déterminât, entre ces contractans, la loi même des rapports économiques et sociaux. Autant de réformes qui, sous l’apparence de nouveautés révolutionnaires, ne seraient, à vrai dire, qu’un retour vers l’esprit des siècles passés. M. Salvatore d’Amelio, avocat fiscal à Catanzaro, recherchait cette année même, dans les publications d’archives, les anciennes conditions de la propriété ecclésiastique dans l’Italie méridionale[1] ; il établissait, d’après les documens, que la plupart des contrats ecclésiastiques du moyen âge, stipulant le paiement de la redevance en nature et non point en argent, excluaient la clause inhumaine de la « renonciation aux cas fortuits », que le « contrat d’amélioration », dans sa forme archaïque, n’imposait que de très modestes redevances au paysan et parfois même lui concédait à l’avance, en pleine propriété, la moitié du domaine d’église amélioré par son travail, qu’enfin les innombrables arrangemens qui régissaient les rapports entre l’Eglise et ses colons prévoyaient et stipulaient le recours à des arbitres (boni homines) pour la solution des difficultés éventuelles.

  1. Salvatore d’Amelio, Sui contratti agrari medievali. Rome, 1897.