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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 145.djvu/308

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cheval. Ces dispositions prises, il dépêcha Gourgaud à Marchiennes avec l’ordre pour le général Reille de marcher sur Gosselies. Quelques instans plus tard, entre 2 heures et 2 heures un quart, survint le maréchal Ney.

Arrivé le 13 juin à Avesnes, en poste, sans ses chevaux et avec un seul aide de camp, Ney n’avait trouvé, le lendemain, qu’une carriole de paysans pour aller à Beaumont. Là dans la matinée du 15, il avait acheté deux chevaux au maréchal Mortier, rendu impotent par une soudaine sciatique, et avait piqué sur Charleroi en longeant les colonnes. Les soldats le reconnaissaient et paraissaient heureux de le revoir. « Ça va marcher ! criaient-ils, voilà le rougeaud. »

L’Empereur qui voulait aussi que « ça marchât » dit au maréchal : « Bonjour ! Ney. Je suis bien aise de vous voir. Vous allez prendre le commandement des 1er et 2e corps d’armée. Je vous donne aussi la cavalerie légère de ma garde, mais ne vous en servez pas. Demain vous serez rejoint par les cuirassiers de Kellermann. Allez, poussez l’ennemi sur la route de Bruxelles et prenez position aux Quatre-Bras. »

Sur le terrain, en présence de l’ennemi, le beau plan stratégique conçu à Paris par Napoléon se précise et se développe. Il comptait seulement, dans cette première journée, se porter sur le point de jonction présumé des deux armées alliées de façon à les y devancer. Maintenant, puisque ses adversaires lui en laissent le temps, il va étendre son champ d’action et les mettre dans l’impossibilité de se réunir. Le gros des Anglais venant de Bruxelles et le gros des Prussiens venant de Namur, les deux armées doivent nécessairement opérer leur jonction par la chaussée de Namur à Nivelles qui passe à Sombreffe et croise aux Quatre-Bras la route de Charleroi à Bruxelles. L’Empereur veut donc porter son aile gauche aux Quatre-Bras et son aile droite à Sombreffe. Lui-même s’établira à Fleurus, sommet du triangle formé par ces trois points, prêt à fondre, avec sa réserve, sur celle des deux armées ennemies qui s’approchera la première.

Grouchy arriva comme l’Empereur achevait de donner ses instructions au maréchal Ney, qui partit sur-le-champ. Parvenu une heure auparavant au pont de Charleroi avec les dragons d’Exelmans, Grouchy, impatient de rejoindre son 1er corps de cavalerie qu’il supposait engagé, avait devancé la colonne et s’était porté à Gilly en un temps de galop. Après avoir reconnu la position