Les batteries de réserve ouvrent le feu sur les coteaux qui dominent Ligny, la vieille garde se ploie en colonnes par division, les escadrons de service, la 2e division de cavalerie de la garde et les cuirassiers de Milhaud se forment pour l’attaque, le corps de Lobau débouche de Fleurus. Le canon s’arrête, la charge bat, toute cette masse s’ébranle sous la chaude pluie d’orage aux cris de : vive l’Empereur ! La première colonne de la garde (2e, 3e et 4e grenadiers) pénètre à l’ouest de Ligny ; la deuxième (1er chasseurs et 1er grenadiers) aborde ce village à l’est. Entraînés par Gérard, les soldats de Pécheux et de Vichery franchissent le ruisseau de la Ligne, et arrachent enfin aux Prussiens la ferme d’En-Bas et toutes les maisons de la rive gauche. Les débris des divisions Jagow et Krafft et les bataillons de Langen tentent de se reformer sur les premières pentes, au-dessus du ravin. Mais Pécheux s’élance du milieu de Ligny suivi de Vichery et de la première colonne de la garde ; de la droite du village, débouchent le 1er grenadiers et le 1er chasseurs, et des cuirassiers de Milhaud ; et de la gauche, avec l’Empereur, s’avancent les escadrons de service et la cavalerie de la garde. Les Prussiens lâchent pied sur tous les points. Pour marquer la rapidité et l’impression de cette irrésistible attaque, Soult écrivit à Davout : « Cela a été comme un effet de théâtre. »
Blücher arrive de la Haie au grand galop. La pluie a cessé, le vent chasse le reste des nuages. Aux derniers rayons du soleil qui reparaît un instant au-dessus des coteaux de Brye, il voit ses troupes en pleine retraite, et, sur la large brèche faite à son front de bataille, les bonnets à poil de la vieille garde, les grenadiers à cheval hauts comme des tours, les dragons évoluant pour charger, et, dans un étincellement, les 3 000 cuirassiers de Milhaud. Le vieux Blücher « ne se regarde jamais comme vaincu tant qu’il peut continuer le combat. » Pour arrêter les Français, il compte sur la cavalerie de Röder, en réserve entre Brye et Sombreffe, sur les débris de la division Henckel qui, à 6 heures, a été relevée dans Ligny et sur les divisions de Stülpnagel et de Borcke que Thielmann a du détacher de son corps d’armée. Mais, en raison d’ordres mal interprétés, Henckel se trouve déjà près de Sombreffe et Stülpnagel est encore loin de Ligny. Quant aux troupes de Borcke, Thielmann ne peut en dégarnir son front ; il est trop vivement pressé par Grouchy : la division Hulot a enlevé Potriaux et menace Sombreffe, les dragons d’Exelmans (brigade Burthe) ont