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antérieur. Les instrumens de chirurgie, les chromolithographies, les instrumens de musique automatiques, dont la fabrication s’est développée dans une énorme proportion à Leipzig, où elle occupe vingt-six usines et des milliers d’ouvriers, sont atteints très lourdement.

Les houblons sont frappés de 12 cents, environ 63 centimes, à la livre, au lieu de 8 ; la Bavière souffrira de ce chef, et dans son agriculture et dans le commerce de cette plante, qui a son centre à Nuremberg. Les fabricans de verre de Fürth ne pourront plus exporter de verre étamé (belegtes Glas). Les charbons pour lumière électrique sont taxés à raison de 15 pour 100 de leur valeur. Les jouets paraissent pouvoir supporter l’augmentation des droits qui varie entre 25 et 40 pour 100, ainsi que les articles de voyage, dont la fabrication n’est guère développée aux États-Unis : l’industrie des brosses d’Erlangen est menacée par un tarif de 40 pour 100. Les crayons de Nuremberg étant frappés de 25 pour 100, on croit que seules les maisons dont les produits sont les meilleurs et réputés tels pourront continuer à vendre. Les livres paient 48 pour 100 : on suppose qu’il faudra installer des imprimeries en Amérique si on ne veut pas perdre entièrement ce débouché.

Après avoir ainsi passé en revue les industries qui exportent leurs produits aux États-Unis, l’auteur de l’étude que nous venons de résumer conclut avec raison que d’aussi brusques changemens dans la législation douanière sont plutôt de nature à nuire aux fabricans des pays exportateurs et à grever les consommateurs indigènes qu’à encourager et à développer l’industrie nationale américaine. Celle-ci ne saurait rien entreprendre de durable sur la foi de tarifs que des élections politiques bouleversent de fond en comble. Dans l’ensemble d’ailleurs, au point de vue qui nous occupe, l’industrie allemande, au prix de certains sacrifices, paraît en mesure de maintenir en bonne partie ses exportations : pour les produits auxquels le tarif Dingley ferme la porte, elle cherche et trouvera d’autres débouchés, qui compenseront ceux dont elle se voit privée. Beaucoup de bons esprits se déclarent opposés à une politique de représailles vis-à-vis des États-Unis, d’une part, parce qu’il ne semble pas que le tarif Dingley soit destiné à durer ; d’autre part, parce que la majorité des produits américains exportés sont de nature telle que ceux qui voudraient les frapper se nuiraient à eux-mêmes plus qu’aux Américains.