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suivant la même route. Nous avons longtemps observé un groupe de trois pigeons qui se rendaient chaque jour aux champs à la même heure. A l’aller comme au retour ils suivaient, sans jamais s’en écarter, un chemin que nous avions repéré sur les accidens du sol voisin. Nous avons observé la même régularité dans l’apparition et le passage quotidien de deux oiseaux de proie.

Les paysans connaissent d’une façon très précise les points qui jalonnent les courans de migration des oiseaux ; ils mettent d’ailleurs ces notions à profit pour se livrer dans certaines saisons à des chasses très fructueuses.

Des observations semblables ont été faites sur les poissons, en mer aussi bien que dans les rivières ; ce sont ces données très précises qui sont utilisées journellement par les pêcheurs.

Nous n’insisterons pas davantage sur un ensemble de faits observés et connus depuis longtemps. Nous nous bornerons à en déduire une première conclusion : dans l’air, sur terre ou dans les eaux, les animaux suivent tous des routes parfaitement déterminées ; leur circulation semble donc être assujettie à d’autres règles que le caprice ou le hasard.


II

Les actions des animaux sont toutes dictées par une même loi à laquelle chacun d’eux obéit d’une façon différente. L’animal subit en effet l’influence du milieu ; s’il trouve autour de son gîte d’abondantes ressources pour la vie, il circule peu et son existence se passe sur un fief très restreint. Dans le cas contraire, il mène une vie des plus agitées, parcourt sans cesse son domaine, en recule le plus possible les limites et les franchit parfois. Chaque animal est donc amené à contracter des habitudes qui lui sont personnelles et qui constituent son individualité ; il obéit à l’appel de l’instinct, mais il semble avoir le choix des moyens d’exécution, une certaine liberté, tandis qu’il subit simplement l’influence du milieu. Cette réserve était nécessaire avant de fixer les règles générales auxquelles est soumise la circulation des individus de chaque espèce.

C’est un fait d’expérience connu depuis longtemps que l’animal circulant sur le terrain qui lui est familier est guidé dans le retour au gîte par les cinq sens agissant de concert. Toutefois, chez chaque espèce, l’un des sens est plus développé et joue par