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qu’au contraire elles se ressemblent beaucoup entre elles. Déjà les anciens s’en étaient aperçus ; la science moderne a confirmé leurs conjectures : les peuples qui s’en servaient étaient frères. Pour les distinguer de leurs voisins, qui sont d’un autre sang, on les appelle d’ordinaire Italiques ou Italiotes. L’autre observation, c’est que la langue qu’ils parlaient, et qui, avec quelques variétés, est à peu près la même pour tous, appartient au groupe des langues indo-européennes. Les Italiotes faisaient donc partie de cette grande famille de peuples qui venaient on ne sait d’où, qui se sont mis en route on ne sait quand, mais dont nous savons avec certitude que ce sont nos pères. Ils se dirigèrent vers l’occident, et à chaque étape de leur long voyage une partie d’entre eux, quittant les autres, alla chercher fortune de son côté. C’est ainsi qu’ils ont successivement laissé en chemin ceux qui sont devenus les Slaves, les Germains, les Celtes. Plus tard, beaucoup plus tard peut-être, ce qui restait finit aussi par se séparer en deux groupes. Les uns descendirent dans ce petit pays montagneux, aux côtes dentelées, qui fut la Grèce. Les autres poussèrent devant eux, et, profitant des facilités que leur offraient les Alpes en s’abaissant vers la mer, ils pénétrèrent dans la péninsule italique. On a cru plusieurs fois retrouver leurs traces dans les plaines marécageuses qu’inonde le Pô, où ils habitaient des villages construits sur pilotis. Mais ils en furent sans doute chassés par l’invasion de quelque peuple voisin, et, descendant un peu plus bas, ils s’établirent dans le pays qu’ils n’ont plus quitté, les Ombriens au nord, les Osques au midi, les Sabins et les Samnites au centre, les Latins le long du Tibre.

Voilà certainement une histoire bien sommaire et qui est loin de satisfaire tout à fait notre curiosité ; mais au moins elle est sûre. Elle repose sur une base solide, la comparaison des langues. Nous n’avons pas besoin d’aller chercher nos renseignemens dans des traditions incertaines, rapportées par des grammairiens ignorans, interprétées par des critiques téméraires. Nous les avons sous la main : ouvrons au hasard un livre de Cicéron, lisons quelques vers de Virgile ; dans cette page de latin que nous savons par cœur, toute l’histoire primitive du peuple romain est renfermée, et la science n’a pas de peine à l’y découvrir. Les mots les plus anciens, dont les racines se retrouvent dans toutes les langues aryennes, nous ramènent au temps où ce peuple était mêlé et confondu avec tous les autres membres de la famille ; ceux qui ne