recouvre d’un tapis bleu du plus bel effet. Sur les plages salines, le mirage déploie sa décevante fantasmagorie.
Quelques espèces animales particulières au pays en complètent la physionomie. Les marais nourrissent des taureaux noirs et des chevaux blancs, les uns et les autres de petite taille, dont l’origine est inconnue. L’introduction de ces races dans la région remonte certainement à une haute antiquité. Ces animaux vivent en liberté dans un état de demi-sauvagerie. Le delta nourrit en outre 250 000 bêtes à laine environ. Mais, depuis le commencement de ce siècle, des croisemens répétés ont substitué le sang mérinos d’Espagne à la race ovine autochtone.
Le spécimen le plus curieux de la faune du bas Rhône est le castor. C’est le seul pays d’Europe où subsiste encore cet animal. On le trouve sur les rives du grand et du petit Rhône. Il ne vit pas en colonies, comme ses congénères d’Amérique, mais par couples isolés, et se creuse dans la berge du fleuve des terriers dont l’ouverture inférieure débouche dans l’eau, tandis que l’orifice supérieur s’ouvre en terre ferme. Les paysans lui font la guerre parce qu’il ronge les jeunes oseraies, et plus encore par instinct de destruction. Aussi devient-il plus rare de jour en jour.
Les oiseaux aquatiques qui hantent les étangs et les marais du delta sont aussi nombreux que variés. De tous ces oiseaux, le plus remarquable est le flamant rose. Ce grand échassier est très commun sur les bords de l’étang du Vaccarès où il niche. Il est très difficile à approcher, mais les braconniers du pays ont trouvé un moyen plus sûr que le fusil pour le détruire. Sous l’œil paterne de la gendarmerie, ils dévalisent les nids : notre législation ne protège que les petits oiseaux.
Le domaine des eaux est assez pauvre. Le Rhône est très peu poissonneux. Le seul des poissons qu’on y trouve qui mérite d’être cité est l’esturgeon. Au moyen âge, ce poisson était si commun à Arles que la préparation du caviar était une des industries du pays. On en pêche encore quelques-uns entre Arles et Tarascon.
Tout comme l’Algérie, la Camargue est périodiquement ravagée par les sauterelles. Ces insectes destructeurs ne laissent sur leur passage pas une feuille, pas un brin d’herbe. Heureusement, ils ne dépassent guère le centre de l’île.
Ce tableau serait incomplet si j’omettais de parler des moucherons. Le delta du Rhône en est infesté. Ils pullulent surtout