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hectares de surface. Elle se répartit entre les communes de Beaucaire, Fourques, Bellegarde, Saint-Gilles, Redessan, Jonquières, Manduel, Bouillargues, Garons, Saint-Laurent d’Aigouze et Aigues-Mortes. Les terres arables représentent à peu près la moitié de la superficie totale. Dans cette division est comprise la petite Camargue ou Sauvage, territoire de 10 000 hectares séparé de la grande Camargue par un déplacement moderne de l’embouchure du petit Rhône. Ce quartier bien nommé est recouvert par des monticules de sable jadis boisés en pins, partiellement convertis en vignobles qui, après avoir eu quelques années de grande prospérité, périssent à mesure que les racines de la vigne parviennent à la couche de terre salée que recouvre le sable. Les propriétaires auraient été mieux inspirés s’ils avaient complanté ces terrains en pins à résine.


Tel est, décrit dans ses grandes lignes, le vaste territoire dont le Rhône nous a fait don. Voyons maintenant quel est le parti que l’homme a su tirer des libéralités de la nature.

Le fonds déterre constitué par les alluvions du Rhône est excellent, car les limons du fleuve sont très féconds, et ce n’est pas la profondeur qui leur fait défaut. Mais, comme on a pu le voir par ce qui précède, la culture y rencontre trois obstacles majeurs : les eaux superficielles, dont la faible pente du sol ne suffit pas à assurer l’écoulement naturel ; le sel des couches inférieures qui détruit la végétation en remontant à la surface ; la sécheresse fréquente qui compromet les récoltes par le défaut d’humidité. Pour combattre ces trois ennemis de la culture, il faut dessécher les terrains, les dessaler, les irriguer. La faible proportion des terres arables dans la totalité des surfaces démontre que ces conditions sont très imparfaitement remplies.

L’œuvre du dessèchement est très inégale dans les différentes parties du delta. Dans le Plan du Bourg, elle est assurée d’une manière satisfaisante par un ensemble d’ouvrages construits au XVIIe siècle par des ingénieurs hollandais et complétés par l’établissement du canal de navigation d’Arles à Bouc. Dans la plaine du Gard, il n’y a pas d’œuvre d’ensemble : le desséchement est plus ou moins complet, selon que fonctionnent les ouvrages partiels établis. En Camargue, il n’existe pas non plus d’œuvre complète. Les propriétaires ont creusé à leurs frais quelques émissaires dont le fonctionnement est très imparfait. Pour dessécher