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l’organisme ne pourra utiliser, qui par conséquent ne se transformera en aucune énergie vitale, en aucun travail physiologique. Elle passera directement à l’état thermique. On connaît une catégorie d’alimens de ce genre, ou plutôt de substances de ce genre, car elles ne méritent pas le nom d’alimens véritables. L’alcool, les acides qui existent dans les fruits, tels que l’acide malique, citrique, appartiennent à ce type. On les dit purement thermogènes. Quelques physiologistes, — et leur erreur cette fois a son origine dans le préjugé commun, — s’imaginent encore que l’alcool est un générateur de force, dangereux sans doute à d’autres égards et surtout par son abus, mais enfin et tout de même une source d’énergie comme le sucre ou les graisses ; et qu’ainsi, il est capable de fournir à l’homme une partie de l’énergie nécessaire à l’exécution de travaux pénibles. Il n’en est rien. À la vérité l’alcool se détruit ou se brûle dans l’organisme : il produit de la chaleur, mais celle-ci est destinée à se dissiper inutilement. Cette chaleur produite à l’intérieur du corps ne peut lui être d’aucune autre utilité que la chaleur du climat ou de nos foyers. Les thermogènes purs sont donc exclusivement un procédé de chauffage par le dedans. Les alimens dont nous avons parlé tout à l’heure sous le nom de biothermogènes, réalisent également une sorte de chauffage par le dedans, mais en outre ils participent au fonctionnement vital.

En disant que le cycle de l’énergie qui se déroule chez l’animal a son point de départ dans la désintégration chimique de l’aliment, les physiologistes emploient une formule trop générale qui ne serre pas d’assez près la réalité. De là des confusions, des malentendus et par suite des controverses qui renaissent sans cesse et qui donnent à cette partie de la physiologie une apparence de trouble et de désordre qui n’y devrait pas exister. Ce n’est pas le fonctionnement vital dans sa généralité qu’il faut envisager, si l’on veut ensuite descendre jusqu’aux faits et en arriver aux applications : c’est un acte fonctionnel déterminé. On voit alors que la source de l’énergie que cet acte va mettre en jeu se trouve dans la substance de l’organe et du tissu actifs, non pas à l’état d’aliment dans la condition et la forme où l’animal l’emprunte au dehors, c’est-à-dire à l’état d’aliment brut, mais bien à l’état d’aliment digéré, modifié, élaboré et incorporé comme partie intégrante dans le tissu qui va le dépenser, c’est-à-dire en somme à l’état de réserve. Tous les principes de l’énergétique