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bouleaux et de pierres, sans voies de communication, où le fil télégraphique est le meilleur guide que le voyageur ait à suivre. Sur le parcours de ces lignes inhabitées, un certain nombre de cabanes sont construites pour donner abri au malheureux télégraphiste qui, soudainement, au milieu d’une épaisse obscurité et par des froids extrêmement rigoureux, est obligé de partir sur la neige pour aller réparer une ligne rompue. Ces cabanes qui offrent aussi un asile au voyageur (nous avons été heureux d’en user), contiennent un lit de camp, le matériel nécessaire aux réparations, et quelques ustensiles de cuisine. Il n’est pas rare que des bourrasques de neige détruisent même ces refuges.

Les poteaux en bois sont soumis aux diverses causes de destruction qui agissent sur les autres bois. Ils ne résistent qu’un certain temps. La pluie et même l’humidité pénètrent les bois, dissolvent les corps antiseptiques et les rendent plus accessibles à toutes les causes de destruction. L’eau s’introduit dans les canaux du bois et les remplit petit à petit du haut au bas du poteau.

La sécheresse facilite l’action ultérieure de la pluie en déterminant des fentes longitudinales à la surface du poteau.

Le contact du sol agit également par son humidité ; il agit aussi par tes matières minérales et végétales que contient le sol et qui peuvent occasionner des réactions chimiques avec les imprégnations antiseptiques des poteaux. C’est ainsi que les terrains calcaires donnent lieu à la production de bicarbonate de chaux qui réagit sur le sulfate de cuivre et le fait disparaître du pied du poteau. Cette action est si nette que le seul fait d’être planté au voisinage d’un massif de maçonnerie accélère la pourriture des poteaux. Les sols riches en débris organiques facilitent également la pourriture du bois.

Lorsque le bois est attaqué par la pourriture humide, on voit se développer en même temps, à sa surface, des champignons dont l’espèce varie suivant l’essence. Le champignon du pin et du sapin, essences employées le plus ordinairement pour les poteaux, porte le nom de mérule (Merulus destruens ou lacrymans). Il se manifeste sur la partie du poteau tournée vers le nord, c’est-à-dire du côté le plus humide et le moins exposé à la lumière, sous la forme de longs filamens blancs qui remplissent les fentes du poteau, se développent avec rapidité dans le sol environnant, puis se réunissent en une masse molle, compacte, d’où suinte un liquide incolore. Ce champignon, qui se développe sur tous les