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aussi que la reproduction naturelle a cet avantage de ne pas nécessiter une manutention qui coûte toujours assez cher, et qui blesse souvent les poissons : elle a aussi ce grand avantage que tous les œufs sont utilisés.

Il faut se rappeler, en effet, que les œufs de la plupart des poissons produisant des œufs flottans, pélagiques, n’arrivent pas tous simultanément à maturité. Ils mûrissent successivement, les uns après les autres. Dès lors, la pratique de la fécondation artificielle entraîne la perte de beaucoup de ceux-ci. Les premiers expulsés sont mûrs et se fécondent : les autres ne sont pas encore mûrs et ne se fécondent pas : ils sont perdus, à moins qu’on n’ait le soin de « traire » chaque poisson à plusieurs reprises, ce qui constitue une complication notable. On a donc décidé, à Dunbar, de laisser faire la nature. Les poissons prêts à frayer sont transportés dans le vivier spécial qui leur est réservé, et on continue à les nourrir. A mesure que les élémens sexuels sont mûrs, ils sont expulsés, et les œufs se fécondent. Ils flottent près de la surface. Pour les recueillir, on fait comme à Flödevig. Le trop-plein du bassin de fécondation — alimenté par une pompe — s’écoule dans un collecteur tapissé de toile fine. L’eau passe, mais les œufs s’arrêtent, et, pour transporter les œufs, il suffit d’emporter le collecteur. Du collecteur, les œufs, après avoir été nettoyés par des procédés spéciaux, passent aux incubateurs.

On visite ceux-ci chaque jour, pour enlever les œufs morts, et pour voir où en est l’éclosion. Celle-ci demande un temps qui varie selon la température de l’eau, comme chacun le sait. En opérant avec de l’eau à zéro, on pourrait retarder presque indéfiniment l’éclosion : avec l’eau à 7° ou 8°, il suffit de douze ou treize jours pour la morue. Les poissons, une fois éclos, sont maintenus quelque temps dans les boîtes à incubation : on attend que le sac vitellin soit à peu près résorbé, et que la bouche soit bien développée. C’est alors le moment de s’en débarrasser... L’homme a fait ce qu’il pouvait : il leur a permis de saisir la vie : à eux maintenant de se tirer d’affaire. Ils sont bien petits, bien faibles, sans doute : il serait tentant de les conserver quelques semaines, pour leur permettre de se développer et de prendre des forces : mais on ne connaît pas encore le moyen d’arriver à ce résultat si désirable.

En attendant que ce problème soit résolu, on continuera, à Dunbar, comme ailleurs, à transporter les alevins, qu’on ne peut