Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour les mois d’hiver : à de certains mois, le chiffre se trouve décuplé (81 673 francs en octobre 1808, 121 828 francs en décembre 1809) ; mais ce sont là des cas exceptionnels, justifiés par un don spécial fait par l’Empereur à cette destination, et la moyenne, abstraction faite des recettes et des dépenses imprévues, n’atteint point, l’été compensant l’hiver, 3 000 francs par mois.

Toutes les conditions, toutes les professions, toutes les origines se confondent sur ces listes : vieillards des deux sexes, ouvriers sans ouvrage, veuves chargées d’enfans, créoles de Saint-Domingue, demoiselles ou dames nobles ruinées, — beaucoup, infiniment de nobles : sur un seul état de bienfaits où, pour une assez modeste somme, figurent cent trente et une parties prenantes, voici Mesdames Lechat de Mineraye, de Marchais, de Beaune, de Vaudricourt, de Druez, de la Brelaiche, de la Méline, de Cha-vigny, Sablonet de Minuly, de Case, de Chaponay de Jaucourt, de Boisset, de Bivolle, de la Grange, de Bligny, de la Saussaye, de Pallugay, de Montalay, de la Feuillade ! Ne croirait-on pas une liste de dames présentées ?

Les Pensions forment le dernier chapitre de la Cassette et tendent à l’absorber tout entière. Elles grossissent sans mesure chaque année, sautant de 25 000 francs en 1805, à 56 000 francs en 1806, 85 000 francs en 1807, 155480 francs en 1809. Naturellement, une fois acquises, elles passent en droit ; volontiers, comme sous l’Ancien régime, les enfans en demanderaient, en exigeraient la réversibilité, et nul (ne se trouve tenu à reconnaissance. Toutes les ressources qui seraient si utilement employées en secours accidentels se trouvent peu à peu immobilisées ; mais, d’autre part, comment résister à de certains appels ; comment, lorsqu’on est arrivé soi-même à ce comble de fortune, refuser à d’anciennes compagnes la sécurité de l’existence ? C’est qu’en effet les pensionnaires de Joséphine rentrent presque toutes dans cette catégorie : il y a d’abord les gens des colonies ; ici peu de noms qu’on sache : Madame O’Gorman, Madame Mantelle, Madame de Dillon, puis des noms bourgeois : Chaurand, Crusand, Leloutre, Mauger ; c’étaient jadis entre les plus riches de là-bas. Après, viennent les Personnes que Sa Majesté a connues, et ce sont elles qui prennent la grosse part : rien qu’avec ces noms, l’on pourrait refaire presque entière l’histoire de la vicomtesse de Beauharnais, retrouver les sociétés qu’elle a traversées : Madame Duplessis, Mademoiselle Lannoy, Madame Lefebvre, Madame de la