de la France et de l’Église, c’est l’œuvre qui s’impose à nos hommes d’État, s’ils comprennent qu’ils sont, comme le leur disait récemment le président de la Chambre des députés, « les dépositaires de quinze siècles de labeur et de gloire. » Le protectorat des catholiques par la France ne peut plus être aujourd’hui ce qu’il était au temps de François Ier et de Louis XIV. Il doit se modifier en se modelant sur les besoins nouveaux des sociétés modernes. S’il n’est plus la fonction du « roi Très-Chrétien » il doit rester le devoir d’un gouvernement soucieux des intérêts majeurs de la France et du développement harmonieux de son histoire. Renoncer à nos prérogatives les plus enviées sous le prétexte qu’elles sont un héritage de l’ancienne monarchie, qu’elles touchent nécessairement aux questions religieuses et impliquent des relations avec le Saint-Siège, serait la pire des trahisons ; le protectorat, c’est, en Extrême-Orient et en Orient, notre Kiaou-Tcheou, notre Port-Arthur, notre Égypte ; c’est aussi une part de notre histoire, c’est-à-dire une parcelle précieuse de l’âme française[1]. Abandonner tout cela, ce serait pour la France dans le monde un désastre matériel et une faillite morale.
En l’année 1229, le très haut et très puissant empereur Frédéric II, roi des Deux-Siciles, excommunié par le pape Grégoire IX pour sa lenteur et sa mauvaise volonté à remplir son office impérial, obtint par traité d’Alkamil, sultan d’Égypte, la cession de Jérusalem, de Bethléem et de Nazareth, et entrant dans la Ville sainte, il posa lui-même sur sa tête maudite la couronne de Godefroy de Bouillon. Le lendemain, l’archevêque de Césarée, au nom du Souverain Pontife, mit le royaume en interdit, et Grégoire IX refusa de recevoir des mains d’un impie et d’un allié des infidèles l’hommage, pourtant si précieux, des Lieux Saints. C’est la première fois depuis ces jours lointains qu’un empereur d’Allemagne visitera la Palestine. Mais les temps de la lutte du « spirituel » et du « temporel » sont passés ; les conflits d’intérêts qui agitent notre âge ont moins de grandeur tragique : bien qu’il soit le chef d’une nation qui a fui le bercail de Saint-Pierre, c’est l’empereur aujourd’hui qui recherche l’alliance du sacerdoce
- ↑ « C’est l’histoire qui en faisant de nous les ouvriers de la même œuvre, a fait de nous la race française. » F. Brunetière. L’idée de patrie, broch, Hetzel.