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dirige vers le Nord, et va se souder, vers les sources du Karadaria, avec la crête principale du Tian-Chan. Le nœud se fait au Mont Aïou-Tapam, autour duquel rayonnent également plusieurs autres chaînes secondaires.

On voit que, pour passer du Ferganah dans le Turkestan chinois, c’est-à-dire dans le bassin du Tarim, il faut de toute nécessité franchir la chaîne de l’Alaï. Cette traversée, assez difficile, surtout en hiver, peut se faire par un certain nombre de cols.

Le plus bas et le plus accessible, c’est celui du Taldyk, situé aux sources de la rivière du même nom. Son altitude n’est que de 11 600 pieds, et les pentes en sont aisément praticables. Après avoir remonté par une rampe régulière la vallée de la rivière Gouldcha, et celle de son principal affluent, le Taldyk, on passe, par une escalade insignifiante, dans la vallée du Sourk-Ab, c’est-à-dire dans le bassin du haut Oxus. En tournant ensuite à l’Est et en marchant dans la direction d’amont, suivant la dépression d’Alaï, on arrive, par un seuil presque insensible, au col de Taoun-Mouroun, de même hauteur que le Taldyk, qui donne accès dans le bassin du Tarim.

Mais cet itinéraire présentait pour moi le grand inconvénient d’être indirect : il allongeait notre parcours de trois journées en nous faisant décrire un long crochet dans l’Ouest. En outre, cette route, qui, l’été, est vraiment facile, — Skobeleff a réussi à y faire passer sa cavalerie et son artillerie lors de son expédition de 1876, — devient presque toujours impraticable en hiver. Il se produit dans toute la vallée d’Alaï une énorme accumulation de neige. Ce phénomène a été tout spécialement décrit par M. Gapus dans une savante étude qu’il a consacrée à la distribution des neiges sur le Pamir[1]. C’est au prix d’efforts extrêmes que lui et ses compagnons de voyage, MM. Bonvalot et Pépin, sont parvenus à franchir cette vallée d’Alaï qu’ils n’ont eu à traverser, cependant, que dans le sens de la largeur.

A 30 kilomètres plus à l’est que le col du Taldyk, se trouve un autre passage, le col de Chart, ou Chart-Davan, peu étudié par les Européens, et dont les Russes n’ont pas fait un sentier classé, mais qui est très pratiqué par les indigènes. Son altitude est plus forte que celle du Taldyk : elle est de 12 800 pieds ; mais l’escalade est très facile. C’est par-là que le prétendant

  1. G. Capus, Observations et notes météorologiques sur l’Asie centrale et notamment les Pamirs. — Bulletin de la Société de Géographie, 1892.