Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/824

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cernay, qui diffèrent de ceux de l’argile plastique, qui diffèrent de ceux des sables de Cuyse, qui diffèrent de ceux du calcaire grossier, qui diffèrent de ceux des grès de Beauchamp, qui diffèrent de ceux des marnes de Saint-Ouen, qui diffèrent de ceux du gypse. Les ouvrages de Deshayes, Hébert, Munier Chalmas, Stanislas Meunier, Dollfus, Cossmann, etc., ont rendu célèbres les gisemens coquilliers des environs de Paris. Chaque dimanche, de nombreux amateurs vont y chercher des fossiles. Plus heureux sont-ils que les chasseurs, car ils reviennent toujours avec quelque butin, tandis que ceux-là rentrent souvent la gibecière vide ; puis, au lieu de tuer de douces créatures, ils ont le plaisir de tirer de la pierre des êtres auxquels ils donnent par la pensée une seconde vie. Autrefois les géologues avaient peu de facilité au Jardin des Plantes pour déterminer leurs fossiles ; aujourd’hui ils y trouvent de belles et nombreuses coquilles, soigneusement nommées.

Outre nos séries d’Invertébrés, nous avons de très précieuses collections de Vertébrés éocènes. La colline de Monte-Bolca, non loin de Vérone, est composée en partie de marnes qui se séparent en dalles couvertes de poissons ; un comte Gazzola en avait rassemblé une vaste collection. Le général Bonaparte, lors de la campagne d’Italie, l’acheta pour le Muséum ; elle frappe par la conservation merveilleuse des fossiles. On remarque notamment un triptyque dont les trois volets sont des plaques naturelles couvertes de poissons ; en se fermant, les volets mettent les poissons en contact, comme ils l’étaient dans la roche.

Nous possédons, grâce au docteur Lemoine, les plus anciens mammifères découverts en France. Ils ont été recueillis dans la colline de Cernay, près de Reims. Lemoine, comprenant leur importance pour l’histoire de l’évolution, s’est voué à leur étude. Il n’en a d’abord trouvé que peu de débris. Mais, pendant vingt ans, il a chaque semaine été fouiller Cernay ; il rapportait un jour des dents, une autre fois des os des membres, une autre fois une portion de tête, si bien qu’il finit par avoir des squelettes presque entiers. Professeur très apprécié de l’École de médecine de Reims, il pouvait acquérir dans cette ville une importante clientèle ; un jour, il sacrifia sa position, vint s’installer à Paris dans le quartier Latin pour mieux étudier ses chers fossiles. Il est mort récemment, léguant au Muséum les collections qui lui avaient coûté tant de peine. Sa veuve a complété ce legs en donnant au Muséum le terrain de Cernay pour continuer les fouilles. Si on joint aux nom-