la préoccupation du « salut de l’âme » détournant les saints des devoirs de ce monde ; c’est la peur de l’enfer engendrant, chez tous les hôtes de Bannisdale, un mélange de sottise et d’hypocrisie.
Voilà ce que Mrs Humphry Ward a voulu démontrer : et c’est ce que ses lecteurs anglais n’ont pu manquer de comprendre. « L’histoire de Laura Fountain va ouvrir bien des yeux à la tyrannie du papisme, » lisons-nous dans la dernière livraison de la London Quarterly Review. Et le Christian World affirme que, « depuis les Lettres provinciales de Pascal, jamais un coup plus formidable n’a été porté à l’Église catholique. »
Mais le plus surprenant est que des catholiques se soient trouvés pour déclarer que cette thèse était appuyée sur d’excellens argumens. « Certes, écrit un rédacteur du Tablet, — le plus considérable des journaux catholiques anglais, — certes, les catholiques ne sauraient se plaindre de la façon dont Mrs Humphry Ward a représenté un champion de leur foi : et, d’un bout à l’autre, le livre témoigne d’une compréhension remarquable du catholicisme. »
Voilà, en vérité, qui est à peine croyable ! Ainsi le catholicisme anglais est bien tel que l’a décrit Mrs Ward, et ce n’est pas seulement à Bannisdale qu’on a cette étrange manière de le pratiquer ! Ainsi l’usage est, chez les catholiques anglais, qu’un frère condamne sa sœur à une vie de privations pour subvenir aux dépenses d’un orphelinat ; qu’un mari demande à Dieu la mort de sa femme, et « se débarrasse de ses enfans » par-dessus le marché ; qu’un fils refuse d’assister aux derniers momens de sa mère ; qu’une fille fasse mourir son père en entrant au couvent contre sa volonté ! Ainsi tous les prêtres catholiques ressemblent au curé Bowles, qui tue les mouches parce qu’il voit en elles « l’armée de Beelzébub, » et toutes les religieuses ressemblent à sœur Angela qui apprend aux petites filles l’histoire d’un saint abandonnant son frère ! Et la bassesse, la stupidité, la mauvaise foi des catholiques de Bannisdale, tout cela leur est commun avec la grande majorité de leurs coreligionnaires ! Et nous devons prendre au sérieux cette peinture d’un monde dont Mrs Humphry Ward nous fait savoir qu’il est « empoisonné par l’horrible égoïsme de la religion ! » C’est à quoi, pour notre part, nous ne pouvons nous résoudre. Nous estimons que Laura Fountain a raison de juger