Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 150.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la chaleur qu’ils produisent. Au regard de la Théorie énergétique, ce ne sont pas des alimens véritables puisque leur énergie potentielle ne se transforme en aucune espèce d’énergie vitale, mais passe, d’un trait, à la forme calorifique. Au contraire, d’autres physiologistes regardent l’alcool comme étant réellement un aliment. C’est que, pour eux, est réputé aliment tout ce qui, dans l’organisme, se transforme en produisant de la chaleur et ils apprécient la valeur alibile d’une substance par le nombre de calories qu’elle peut céder à l’organisme. À ce titre l’alcool serait un aliment supérieur aux hydrates de carbone et aux substances azotées. Une quantité déterminée d’alcool, le gramme par exemple, vaut autant au point de vue thermique que 1gr, 66 de sucre, que 1gr, 44 d’albumine et que 0gr, 73 de graisse. Ces quantités seraient isodynames.

C’est là une conclusion évidemment outrée. L’expérience l’a condamnée. Les recherches de C. von Noorden et de ses élèves, Stammreich et Miura, ont précisément établi d’une manière directe que l’alcool ne peut pas être substitué dans une ration d’entretien à une quantité exactement isodyname d’hydrates de carbone. Si l’on opère cette substitution, la ration naguère capable de maintenir l’organisme en équilibre, devient insuffisante ; l’être vivant perd de son poids : les matériaux azotés qui entrent dans sa constitution se disloquent et l’animal décline.

Dans ce qui précède, nous nous sommes bornés à envisager un seul caractère de l’aliment, le plus essentiel à la vérité, le caractère énergétique. Il faut qu’il fournisse de l’énergie à l’organisme et pour cela qu’il s’y décompose, s’y disloque et en sorte simplifié. C’est ainsi par exemple que les graisses, qui sont des édifices moléculaires compliqués au point de vue chimique, s’échappent à l’état d’acide carbonique et d’eau. Il en est de même pour les hydrates de carbone, matières amylacées et sucrées. C’est parce que ces composés descendent à un moindre degré de complication durant leur exode à travers l’organisme, qu’ils abandonnent, par cette sorte de chute, l’énergie chimique qu’ils recelaient à l’état potentiel. La thermochimie permet de tirer de la comparaison de l’état initial avec l’état final, la valeur de l’énergie cédée à l’être vivant ; cette valeur énergétique, dynamogène ou thermogène, donne ainsi une mesure de la capacité alimentaire de la substance. Un gramme de graisse, par exemple, laisse à l’organisme une quantité d’énergie équivalente à 9,4 calories ; la