de 50 à 100 pieds de long, une remise en fer, et deux casemates affectées au logement de son personnel : coût, 1 300 000 francs. La société rivale, the North American Transportation and Trading Company, s’est offert une installation presque aussi monumentale. Quand le bâtiment va, dit-on, tout va. Le bâtiment ne languit pas à Dawson. Les scieries mécaniques y grincent nuit et jour et les murs de bois s’élèvent de toutes parts. Dès 1897, l’heureux J. Ladue n’avait ni assez de bois, ni assez de terrain pour satisfaire une clientèle qui devenait de plus en plus nombreuse et de plus en plus impatiente. La ville sera vite à l’étroit. La montagne serrant de près la rivière et le fleuve, les alluvions qu’ils ont étalées sur leurs bords ne dépassent guère, comme étendue superficielle, trois ou quatre cents hectares. Mauvais sol, périodiquement submergé et toujours marécageux. On s’en dispute cependant les morceaux. Les plus recherchés sont ceux qui longent le quai : le prix de 60 000 francs a été demandé et obtenu pour une seule parcelle. On se met aussi à construire au-dessus du Klondyke : la rive y est plus sèche et l’air y serait sain, n’étaient les Indiens qui ont longtemps campé là et qui, en matière d’hygiène, professent les plus déplorables principes.
Ce serait flatter Dawson City que de comparer ses habitations aux chalets alpestres. La maison-type, indéfiniment reproduite, coule 5 000 francs, un peu plus ou un peu moins. Elle mesure 16 pieds sur 14, et n’exige, comme élémens essentiels, que 30 ou 40 troncs d’arbres. Ces troncs, à peine égalisés, sont posés les uns sur les autres, avec de la mousse comme remplissage ; une fenêtre unique est ménagée du côté du midi. Plancher en bois, s’il y a un plancher, et toit de bois, dépassant les murs. Moyennant un bon poêle, on assure qu’on n’est pas trop mal dans ces huttes, et tel nabab de fraîche date, sous les lambris dorés de son hôtel de San Francisco, garde assez bon souvenir de son domicile antérieur. Le plus bel établissement de Dawson est l’Opera House Saloon, où l’on boit nuit et jour et où l’on danse, au piano, de six heures du soir à cinq heures du matin. Les danseuses qui font partie du mobilier de la salle de bal gagnent jusqu’à 100 dollars par semaine, leurs appointemens réguliers s’augmentant d’une commission de 25 pour 100 sur les consommations prises par leurs cavaliers. On ne se fatigue pas pour rien au Klondyke, et tel qui ne se sent aucun goût pour piocher la terre a pu se dire que, même sans changer de métier, il y ferait de bonnes affaires.