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LA JEUNESSE
de
LECONTE DE LISLE




Charles Leconte de Lisle quitta l’île Bourbon, le 11 mars 1837, pour venir étudier le droit en France. Il laissait ses parens désolés de son départ. « J’ai beau chercher à me faire une raison de son absence, écrivait son père, quand son souvenir me revient, et il me revient souvent, mes yeux se mouillent. Je me laisse volontiers pleurer. Puisses-tu, mon ami, n’être jamais obligé de te séparer de tes enfans à d’aussi immenses distances ; cela nuit au bonheur de la vie. » Avant de s’installer à Rennes pour y suivre les cours de la Faculté de droit, Charles devait passer quelques mois chez son oncle, M. Louis Leconte, avoué à Dinan. C’était le plus proche parent que M. Leconte de l’Isle[1], émigré depuis vingt ans, eût laissé dans la petite ville bretonne d’où il était originaire. C’était à lui qu’il confiait la surveillance et la tutelle de son fils pendant le temps de ses études, en lui donnant tout pouvoir pour l’administration du budget et la direction de la vie du jeune étudiant.

La correspondance échangée entre les parens de Bourbon et le cousin de Bretagne, les notes que j’ai prises dans les archives de l’Université et dans les journaux et revues de Rennes, — notes et correspondance éclairées ou complétées par quelques lettres de

  1. Au sujet de l’orthographe du nom, dans les lettres et documens de cette époque, il y a lieu de remarquer que le nom Leconte est toujours écrit en un seul mot par les trois correspondans ; l’apostrophe à l’Isle figure dans les signatures du père ; elle est omise dans celles du fils. Je me conformerai, en les nommant, à l’orthographe adoptée par chacun d’eux.