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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/341

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la carte et qu’au Congrès de Paris, il s’était adressé à d’autres sans être plus heureux. « Il a fini par trouver son homme à Plombières, ajoutait-il. Cavour est-il son instrument, ou est-il la dupe de Cavour ? Je l’ignore, il est difficile de scruter le fond des cœurs. Il nous écrit qu’il désire la paix et nous demande qu’en Angleterre et en Prusse on arrête les armemens, car il pourrait bien être forcé de tirer l’épée pour maintenir son prestige. » — L’Empereur parlait trop avec les étrangers et pas assez avec ses ministres et ses diplomates.

En parcourant toutes ces correspondances, si souvent compromettantes pour la politique impériale, on déplore amèrement que les papiers qui auraient pu servir à les contrôler et à les réfuter aient disparu, le 4 septembre, dans le sac des Tuileries et, le 21 mars, dans les incendies de la Commune. Les rares épaves qui ont été préservées du pillage ou des flammes ont permis de rectifier plus d’une erreur et de préciser plus d’un point d’histoire. Aucun souverain, malheureusement, n’a été moins préoccupé que Napoléon III du soin de sa défense. Tandis que, dans toutes les cours et toutes les chancelleries, on recueillait et on triait soigneusement tout ce qui était de nature à le compromettre, afin de s’en faire un jour une arme contre lui, lui, détruisait les lettres qui auraient pu le servir contre ses ennemis personnels.


XIII. — LE COMTE DE BEUST AUX TUILERIES ET A WINDSOR

Les ministres des petites cours allemandes s’agitaient beaucoup et, de tous, M. de Beust était le plus remuant. Il avait la manie de se frotter aux grandes puissances, de s’insinuer dans leurs affaires pour les embrouiller ; il jouait sur la scène politique le rôle des raisonneurs. Voyant les événemens se précipiter, pour rehausser son importance, il crut devoir faire une tournée diplomatique à Berlin, à Francfort, à Paris et à Londres. Il raconte, dans ses pâles et insignifians Mémoires, qu’arrivé à Paris, il se trouva sous le coup d’une audience impériale, sollicitée à son insu par l’envoyé saxon.

Il grillait d’envie d’être reçu par l’Empereur, et il prétend l’avoir été malgré lui, par suite d’un excès de zèle de M. de Seebach ! « Je n’ai pas besoin d’ajouter, dit-il, que ma visite aux Tuileries, préparée par l’ambassadeur saxon, m’ennuyait fort : il n’est jamais agréable d’entrer dans une maison où l’on sait que