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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 153.djvu/382

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revue des deux mondes.

Il s’y est élevé non par la force de ses armes, ni par la richesse de ses domaines, mais par l’unité morale de son existence collective. Quand une nation a d’elle-même plusieurs conceptions et que, selon la carrière qu’ils ont embrassée ou les préjugés en vogue dans le groupe social dont ils font partie, ses enfans entretiennent à son égard des espérances dissemblables et souvent contradictoires, cette unité ne peut se réaliser. La Hollande la possède, et ce n’est pas à ses dimensions restreintes et au chiffre modeste de ses habitans qu’elle le doit, car elle partage ce privilège avec les deux grands groupemens anglo-saxons, l’empire britannique et les États-Unis. Là aussi, l’unité morale est le secret du passé et le gage de l’avenir. Le vaste édifice et la petite maison ont donc été bâtis avec le même ciment. C’est celui de la liberté. Mais, si nous nous décidons à en faire usage, rappelons-nous qu’on doit l’employer dès la base, dès les fondations, et qu’il ne s’accommode d’aucun mélange. La liberté au collège : à cette condition, le citoyen sera vraiment libre. Les quelques restrictions qui conviennent ne sont efficaces précisément qu’à l’heure où, dans notre imprudence, nous supprimons tout contrôle. L’Angleterre nous en avait prévenus ; la Hollande nous le confirme ; la sécurité de l’étudiant veut qu’une certaine contrainte soit maintenue sur lui. En tout cas, il s’agit là d’un ciment durable et résistant. Réjouissons-nous de le constater, car, pour l’honneur du monde et la paix de l’Europe, il importe qu’il y ait une Hollande et qu’elle soit forte.

Pierre de Coubertin.