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bonne volonté est courageuse, et mérite qu’on lui fasse crédit. Tout à fait à sa place aux Travaux publics, comment aurait-il pu se douter, il y a huit jours, qu’il était sur le point de passer à la Guerre ? Mais il fallait dénouer rapidement la crise ; il fallait fermer au plus vite le trou laissé béant par le départ de M. de Freycinet ; on y aurait aperçu trop de choses si l’on avait eu le temps d’y regarder. M. Camille Krantz s’est dévoué. Il apportera, dans ses fonctions nouvelles ses qualités personnelles de travail, de ténacité, et d’absolue probité intellectuelle. Combien de ministres de la Guerre l’affaire Dreyfus n’a-t-elle pas déjà dévorés ! Nous souhaitons que M. Camille Krantz soit le dernier aux prises avec elle, et qu’il y survive.


En Italie, le ministère Pelloux a donné sa démission : le général Pelloux est chargé d’en former un autre, et on croit généralement qu’il y réussira. La chute du Cabinet n’a eu rien d’imprévu : à plusieurs reprises, pendant les vacances, on a entendu des craquemens dans l’édifice ministériel. Est-ce parce qu’il avait déjà assez duré, au moins sous sa forme première ? Est-ce parce que les impatiences parlementaires commençaient à se manifester autour de lui sous une forme violente ? Est-ce parce qu’il a réellement commis des fautes graves ? Il est probable que toutes ces causes ont eu leur part dans le dénouement qui vient de se produire. Le ministère Pelloux, né de circonstances qu’on se rappelle et formé un peu à la hâte, n’avait une base, ni bien large, ni bien solide, dans la Chambre des députés. Mais sera-t-il possible de lui en donner une différente ? C’est la question qui est posée aujourd’hui. Le général Pelloux négocie avec différentes personnes et différens groupes. On sait de reste que, dans la Chambre italienne, il n’y a pas plus de majorité homogène que dans la nôtre, ou plutôt qu’il y en a encore moins. Ce n’est donc pas dans ce milieu qu’il faut s’attendre à l’application exacte des principes du gouvernement parlementaire. La première déviation à ces règles consiste dans le fait même que le chef du Cabinet démissionnaire est appelé à en composer et à en présider un autre. Sans doute il n’a pas été battu par la Chambre, mais c’est parce qu’il a pris les devans sur le vote qui allait avoir lieu, et qu’il a donné sa démission sans l’attendre. Le ministre particulièrement Aisé dans le débat était l’amiral Canevaro, ministre des Affaires étrangères ; nous allons voir ce qu’on lui reprochait. Le général Pelloux a commencé par établir très étroitement sa solidarité avec lui, et il l’a fait dans les termes les plus nobles. Se séparer de son collègue, rejeter sur lui seul toute la responsabilité et chercher à