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faite pour attirer les regards de l’observateur qu’une démonstration capable déjà de peser avec autorité dans la balance où se décident la valeur des doctrines et le destin des écoles. Peut-être le président de la Chambre de commerce enflait-il un peu la voix, lorsqu’il concluait en ces termes son rapport de l’an dernier : « La nation entière est de plus en plus fière de sa métropole, devant laquelle s’ouvre un avenir presque indéfini… S’il est glorieux d’être un citoyen des États-Unis, combien plus glorieux encore d’être un citoyen de Washington, le cœur de l’Union américaine… »

Mais, il ne prévoyait pas qu’à brève échéance un point de vue inattendu allait recommander, à un nouveau titre, le système dont il célébrait les mérites.

Ce n’est pas sans anxiété, en effet, que le monde voit aujourd’hui un grand peuple changer brusquement son axe et s’orienter vers d’autres horizons. À ce tournant aventureux de la destinée nationale, n’avoir, grâce aux sages dispositions du législateur, aucune part aux agitations du Forum, être à l’écart des responsabilités qui s’assument, à l’abri des jugemens qui peut-être se préparent, pour un citoyen, c’est un avantage, et c’est un privilège pour une cité. Mais, pour une de ces capitales où l’esprit synthétique des foules cherche volontiers l’image réelle et comme l’incarnation des Républiques ou des Empires, c’est un bienfait souverain, de n’avoir, quant à elle, à répondre de rien devant l’Histoire et de pouvoir borner son rôle à réserver un piédestal dans ses jardins aux héros pleurés par la patrie, quels qu’aient été la fortune de leurs armes et le but de leurs combats.

Paul Lefaivre.