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y livrer paisiblement aux occupations de notre choix ; ce n’est pas du tout pour cela qu’on nous donne des chaires ; et ceux-là sont déjà trop heureux dont les obligations professionnelles et les corvées de métier ne sont pas absolument étrangères à l’objet favori de leurs « recherches » et de leurs « travaux. »

« Un des défauts les plus incontestables du baccalauréat, nous dit en second lieu M. Pozzi, c’est d’être un examen où le hasard et la chance ont une part énorme. » Et, assurément, il a raison : la chance et le hasard ont leur part dans l’examen du baccalauréat. Ne l’ont-ils pas aussi, sans parler des concours, dans les examens qu’on passe à l’Ecole de droit, ou à l’Ecole de médecine ? Que cela soit d’ailleurs une « cause funeste de démoralisation pour les jeunes esprits, » je l’accorde sans peine à M. Pozzi. Mais a-t-il bien fait attention qu’il s’attaquait, dans sa critique, au système des concours ou des examens en général ? et comment donc ou par quoi prétend-il le remplacer ? Par le choix ou par la faveur ? C’est ce qu’il aurait bien dû nous dire. Oui, nous passons trop d’examens en France, et dans tous ces examens, il est vrai, « le hasard et la chance ont une part énorme. » Mais le moyen de les éliminer ? et, quand dix, quinze, vingt concurrens se disputent une place ou un diplôme, quel autre moyen que le concours ou l’examen nous proposera-t-on pour décider entre eux ? Et, remarquez, tout au contraire de ce qui a lieu dans beaucoup d’autres examens, que rien ne s’oppose, absolument rien, à ce que l’on fasse autant de bacheliers, s’ils en sont dignes, qu’il y a de candidats au diplôme.

Autre grief : « A partir de la troisième ou de la seconde, l’écolier est hypnotisé par la perspective de l’examen final et de l’énorme effort de mémoire qu’il va solliciter. Il ne s’occupe plus de s’instruire réellement, mais seulement d’emmagasiner les élémens d’un programme démesuré. » Dirai-je ici que je serais curieux de savoir combien, hélas ! il y a aujourd’hui de jeunes gens qui s’occupent de « s’instruire réellement, » même parmi ceux qui se préparent dans nos Facultés aux examens des licences ou des agrégations ? A plus forte raison, dans nos classes de « mathématiques spéciales, » ou de « mathématiques élémentaires, » parmi ceux qui se préparent aux Écoles : Polytechnique ou Centrale, Militaire ou Navale. Que voulez-vous ? C’est la vie, la vie moderne ; c’est la vie telle que la science et le progrès nous l’ont faite ! Nos jeunes gens veulent un savoir qui « se monnoye, »