oreilles ne soient pas ouvertes à sa voix, elle commandera toujours à d’innombrables milliers d’hommes, et tôt ou tard réalisera ses desseins. Des hommes graves et experts en politique sont persuadés qu’il est absolument besoin d’une déclaration, où seraient promulguées, d’une façon authentique, les parties du droit canon qui concernent le droit des gens et la nature de la guerre[1]. »
La suspension du Concile et les graves soucis créés par l’occupation de Rome avaient empêché Pie IX de mettre ces vœux à l’étude. Mais les archives du Saint-Siège ne sont point des oubliettes ; et les propositions du Tsar en 1898, dont plusieurs chancelleries européennes ne laissèrent point d’être étonnées et comme troublées, ne prenaient point au dépourvu la curie romaine. Elle apprend beaucoup et travaille beaucoup, même lorsqu’elle se tait et lorsqu’elle attend : silence et patience sont peut-être, en définitive, le meilleur apprentissage pour la préparation de l’avenir.
Cet avenir, dont on osait à peine escompter l’échéance et dont le Pape et le prince Lobanoff s’étaient vraisemblablement entretenus comme d’une lointaine possibilité, survenait inopinément, par l’entreprenante initiative du Tsar : le Vatican était tout prêt à y faire face et bien outillé pour y pourvoir.. On s’en rendait compte à Saint-Pétersbourg ; et M. le comte Mouravieff, à la date du 23 février, chargeait M. Tcharykoff d’exprimer au Vatican ses remerciements pour « la réponse pleine de sympathie du Pape » et pour ses « dispositions profondément et sincèrement favorables envers la grande œuvre de l’apaisement général. »
Tandis que se poursuivait, entre le cabinet de Saint-Pétersbourg et le Vatican, cet échange de marques de confiance qui étaient beaucoup plus que des courtoisies, une partie de la presse italienne commençait d’afficher des inquiétudes très vives. Elle demandait au gouvernement royal, elle demandait même à la Russie, si le Tsar continuerait, jusqu’au bout, de témoigner au souverain du Vatican des égards spéciaux ; elle interprétait ces
- ↑ Nous empruntons beaucoup de ces détails à un excellent article de M. Chrétien, professeur à l’Université de Nancy, publié dans la Revue générale de droit international public de mai 1899.