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administratives, n’en font qu’une, l’Algérie et la Tunisie, constituent la base naturelle et nécessaire de notre empire continental africain ; c’est chez elles que se trouvent les ressources abondantes, quasi inépuisables, en hommes et en approvisionnemens. Fussent-elles coupées de la métropole pendant un an ou deux, elles continueraient à vivre de leur vie propre ; elles souffriraient dans leur commerce et dans leurs intérêts économiques, mais elles se trouveraient toujours largement pourvues de tous les objets dont les hommes en général et les blancs en particulier ont besoin. Les effectifs considérables que nous entretenons d’une façon permanente dans ces pays se prêtent à des prélèvemens pour une action au dehors. Si la France était en paix avec l’Europe, rien ne serait plus aisé que de prélever 12 000 ou 15 000 hommes sur les 60 000 ou 65 000 qui sont établis dans le nord de l’Afrique pour soutenir celles de nos colonnes qui seraient en péril sur un autre point de ce continent. Alors même que nous nous trouverions en guerre avec une puissance européenne, surtout avec une puissance maritime comme l’Angleterre, il serait encore possible de prélever 12 000 ou 15 000 hommes sur nos effectifs algériens ; en effet, l’appel de la réserve de l’armée active et de la garde territoriale parmi nos colons fournirait un effectif au moins égal, qui pourrait prendre la place de celui que l’on enverrait sur un autre théâtre de guerre.

L’Algérie et la Tunisie, la première surtout, voilà donc notre grande réserve, la colonie mère qui peut effectivement assister toutes nos autres colonies africaines ; il suffit de lui frayer une issue pour transporter là où il en est besoin et le superflu de ses soldats et le superflu de ses approvisionnemens. Notre situation dans l’Afrique méditerranéenne est infiniment plus forte que celle de l’Angleterre eu Égypte ; nous nous y trouvons aussi bien plus voisins de l’Afrique du centre, car, si Alger, Philippeville, Bône, Bizerte, sont de cinq à six degrés plus au nord qu’Alexandrie, d’autre part, une ligne quasi droite nous conduit de l’un de nos ports africains au centre du Soudan, tandis que, du Nil, il faut traverser vingt degrés de latitude pour y parvenir.

Par une singulière méprise, nous n’avons pas su, depuis près d’un demi-siècle, tirer un parti quelconque de notre admirable position nord-africaine. Maîtres de Laghouat dès 1852, nous sommes restés plus de vingt ans pour franchir une nouvelle étape vers le sud ; un raid de cavalerie, sous le commandement