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II. — L’ARBITRAGE PROPREMENT DIT

Il est à peine utile de rappeler quel a été, depuis trente ans environ, le développement de l’arbitrage dans la pratique internationale. L’exposé de ce progrès a été fait cent fois et devient un lieu commun. Peut-être ce mouvement d’opinion a-t-il contribué, plus que tout le reste, à faire naître un grand espoir dans l’esprit de l’empereur Nicolas. Ce prince a pensé que l’heure était propice et qu’il était à même de prendre utilement en main la plus noble des causes.

Le projet russe, tel qu’il fut soumis aux délibérations du comité d’examen, était on ne peut mieux coordonné.

Il déterminait d’abord, de la façon la plus judicieuse, les conflits qui pouvaient rentrer dans la sphère de l’arbitrage et ceux qui devaient en être exclus. « En ce qui regarde les cas de litige se rapportant à des questions de droit et, en premier lieu, à celles qui concernent l’interprétation ou l’explication des traités en vigueur, l’arbitrage est reconnu par les puissances signataires comme étant le moyen le plus efficace et en même temps le plus équitable pour le règlement à l’amiable de ces litiges (art. 7). » « Les puissances contractantes s’engagent par conséquent à recourir à l’arbitrage dans les cas se rapportant à des questions de l’ordre mentionné ci-dessus, en tant que celles-ci ne touchent ni aux intérêts ni à l’honneur national des parties en litige. » C’est la doctrine communément admise. « L’arbitrage, dit M. Calvo, peut porter sur toute espèce de désaccord ou de débat international, excepté ceux dans lesquels l’honneur ou la dignité nationale sont directement en jeu. » « Il n’est guère admissible, écrit encore le jurisconsulte allemand Geffcken, qu’un État soumette à un arbitrage les questions concernant sa puissance et son honneur. »

L’arbitrage facultatif est la règle. Ainsi l’exige l’indépendance des États. « Chaque État reste seul juge de la question de savoir si tel ou tel cas doit être soumis à l’arbitrage (art. 9). »

Mais le projet apporte immédiatement un certain nombre d’exceptions au principe. « Excepté, poursuivait l’article 9, ceux énumérés dans l’article suivant et dans lesquels les puissances signataires du présent acte considèrent l’arbitrage comme obligatoire pour elles. »