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çures de la peau et des muqueuses, les sensations de picotement et même les hémorragies, le pouvoir desséchant de l’air de montagne produit quelques effets bienfaisans : il tarit souvent les sécrétions exagérées, des coryzas, des rhumes, des eczémas.

D’autres menus faits que tous les touristes attentifs ont pu observer traduisent ce pouvoir desséchant de l’air des hauteurs. Les craquemens des meubles récemment amenés de la plaine n’ont pas d’autre cause. De même encore cette pratique des montagnards du Valais qui conservent la viande sans la saler, en l’étendant simplement en tranches minces au soleil ; ou, enfin, cette particularité macabre signalée par P. Regnard, qu’à la morgue du Saint-Bernard, où l’on garde les restes des malheureux perdus l’hiver dans les neiges, les cadavres se dessèchent et se momifient sans se putréfier.


IV

La légèreté, la pureté, la sécheresse de l’air des montagnes en sont les trois qualités principales ; elles ont leur part dans la constitution du climat d’altitude : elles expliquent certaines particularités de la vie en montagne, la transparence de l’atmosphère par exemple, qui est la source de tant d’erreurs d’appréciations sur les distances, et cet autre trait enfin qui frappe tous les ascensionnistes ou les résidens des grandes altitudes, à savoir le silence extraordinaire qui y règne, d’où se dégage une impression si profonde de calme et de repos. À la vérité, la plupart des causes ordinaires des bruits font défaut ; il n’y a ni tumulte de la foule, ni tapage produit par l’exercice des métiers, ni bruissement des feuillages, ni bourdonnement des insectes, ni craquemens des branches : mais, en outre, les sonorités qui s’éveillent dans ce milieu tranquille s’y étouffent vite, l’air moins dense conduisant mal les ondes sonores.

Quant aux particularités du climat, elle pourraient s’exprimer, si l’on n’a en vue que les périodes de temps clair, en disant que l’hiver y est chaud et que l’été y est frais. Cela semble un paradoxe et c’est pourtant une vérité. Il faut d’abord bien stipuler que la belle saison à la montagne est l’hiver : les mois les meilleurs sont janvier, février et mars. L’été est aussi une période favorable, à la condition qu’il ne soit pas pluvieux. Quant au printemps et à l’automne ce sont des saisons franchement mauvaises, pendant lesquelles il faut fuir les montagnes.

L’hiver, même quand le thermomètre est très bas à l’ombre, on a toujours chaud. Les voyageurs qui arrivent au mois de janvier par un