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prie de ne pas oublier de satisfaire ma curiosité à ce sujet dans votre réponse, si réponse il y a. Je ne puis rencontrer M. Dupuy. Il faudra que j’y renonce. Adieu ! embrassez tendrement) Mme Papin et priez-la de songer à mes confitures. Mes respects et amitiés à Mme Dupuy, au docteur, à l’aimable garde national, croyez-vous que son nom m’échappe en ce moment. Ma mémoire me joue souvent de ces tours. Il me reviendra avant que ma lettre soit fermée. Bon, le voici : c’est M. Courtiller. Je l’avais cherché pendant deux minutes. Tout à vous.

« CHARLES LOYSON[1]. »


Qu’auriez-vous fait à la place de Papin en recevant cette lettre ? Vous auriez commencé naturellement par recommander à votre femme de songer aux confitures, et vous auriez suivi attentivement le Journal général en quête des articles de Loyson. C’est ce que firent les amis de Saumur. Mme Papin, que le poète aimait comme une sœur[2], cueillit les plus beaux fruits de son jardin et en fabriqua des compotes, pendant que son mari parcourait avec curiosité les pages du Journal général. Un jour qu’il venait de lire un article de grande allure sur le 21 janvier, il se dit que cette fois cela devait être de la prose de Loyson. Et de prendre sa plume et d’écrire à notre journaliste qu’il l’avait deviné. Je crois même qu’il poussa la malice jusqu’à lui demander s’il n’avait rien emprunté à Thomas ou à Renouard. Toujours est-il que Loyson, piqué au vif, après s’être avoué l’auteur de l’article en question et s’être défendu de tout larcin, railla l’esprit de « divination » du Saumurois qui ne l’avait pas reconnu dans le morceau du Desservant de ***, lequel lui avait attiré deux grandes colonnes d’injures de la part du Mémorial religieux. Le Mémorial était, avec le Journal du Lys l’organe attitré des ultras. Or, Charles Loyson, qui s’était dès les premiers jours de la Restauration rangé résolument du côté des doctrinaires ou des constitutionnels, avait souvent maille à partir avec ces feuilles intransigeantes qui

  1. Lettre inédite.
  2. témoin le quatrain suivant qu’il lui envoya un jour en lui offrant une copie de son portrait :

    L’art a daigné deux fois retracer mon image.
    Mon cœur, par un partage aussi juste que doux.
    De ce double portrait dut faire un double hommage :
    Ma mère eut le premier, le second est à vous.

    Ce portrait au crayon appartient aujourd’hui à M. Paul Pionis.