Il est singulièrement malaisé d’établir avec quelque exactitude la situation d’une doctrine dans l’histoire de la pensée, surtout quand cette doctrine est d’hier, car elle garde encore trop visiblement l’empreinte des préoccupations ou, si l’on veut, des nobles passions qui l’inspirèrent. Au moment de retracer le tableau philosophique de la pensée de M. Ollé-Laprune, nous ressentons un peu de cet embarras. Ecrivain, professeur, élève et ami de Garo qui exerce sur lui une durable influence, philosophe, maître de conférences à l’Ecole normale où il donne pendant plus de vingt ans un généreux enseignement, membre de l’Académie des Sciences morales où il remplace Vacherot, il occupe avec éclat des charges considérables et il les honore encore par l’indépendance de son caractère et la fermeté de sa pensée. En s’y élevant, il ne se croit pas tenu d’abdiquer quoi que ce soit de ses dispositions intimes et de ses vues personnelles. « Ceux qui sont nés médiocres, nous dit Pascal, sont machine partout. » Lui n’est machine nulle part : il met partout de l’âme.
C’est là ce qui fait l’unité de son œuvre et le charme si particulier de ses écrits. Son grand ouvrage sur la Philosophie de Malebranche ne se ressent pas des abstractions métaphysiques : il