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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 156.djvu/877

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CÔTES ET PORTS FRANÇAIS DE L’OCÉAN

métriquement opposés, l’un vers le Nord, l’autre vers le Sud ; elle marque nettement la séparation des deux États et isole complètement la péninsule ibérique. Cette chaîne, dont la limite orientale, le cap de Creux, domine la Méditerranée, vient mourir peu à peu sur la côte de l’Océan ; et de ses derniers contreforts se détache une petite rivière torrentielle, la Bidassoa, française tout à fait à son origine, espagnole sur presque tout son cours, commune aux deux pays aux approches de son embouchure.

La pointe aiguë du Figuier, qui constitue le musoir rive gauche de la Bidassoa et s’avance en mer comme un formidable éperon de navire contre lequel écument les vagues du large, termine à l’Est la côte rocheuse de l’Espagne. La France commence. L’ancienne frontière de l’Ibérie et de la Gaule n’a presque pas changé depuis l’époque romaine ; c’était autrefois le cap le plus saillant de la côte, le dernier promontoire de la chaîne pyrénéenne, que Ptolémée désignait sous le nom d’Œasso[1], et que nous appelons le cap du Figuier, cabo di Monchichaco ; c’est aujourd’hui le thalweg même de la Bidassoa. La ligne dentelée du littoral court encore pendant quelques kilomètres, en s’adoucissant un peu, dans le prolongement de la côte cantabrique, et suit très sensiblement la courbure d’un parallèle de notre globe, puis elle se redresse brusquement vers le Nord et prend nettement la direction du méridien. Les deux grands alignemens des deux côtes d’Espagne et de France se rencontrent ainsi presque à angle droit et dessinent l’immense golfe de Biscaye ou de Gascogne, le sinus Aquitanicus des anciens. Mais le raccordement a lieu suivant une courbe assez régulière, qui court de Saint-Sébastien à Saint-Jean-de-Luz, interrompue à son milieu par les falaises couronnées de bois du cap Figuier et le large estuaire de la Bidassoa.

L’embouchure du petit fleuve présente les aspects les plus variés suivant les heures du jour et la hauteur de la marée, qui atteint et dépasse quelquefois quatre mètres ; et la houle du large, qui peut remonter la vallée à plus de cinq kilomètres, va mouiller la gracieuse petite île des Faisans, célèbre par la conférence de 1659, dans laquelle Mazarin signa le traité des Pyrénées qui cédait le Roussillon à la France et arrêtait en même temps le

  1. τὸ Οἰασσὼ ἀϰρωτήριον τῆς Πυρήνης, Ptolém., Geog., II, VII, 2.