Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’établissement du télégraphe dans les pays nouveaux que nous colonisons. Ces bouts de câbles éloignés les uns des autres, sans lien entre eux, sont une charge parfois lourde, qui ne donne aucune sécurité à nos correspondances et nous laisse toujours tributaires du réseau anglais.

C’est donc une conception erronée et dangereuse de la question des câbles que celle qui consiste à créer de petits réseaux locaux pour nos colonies. La conception vraie, celle qui seule peut conduire à une solution pratique, est la création de systèmes télégraphiques groupant nos possessions coloniales par régions, et les rattachant à la métropole par des câbles indépendans du réseau anglais. C’est le seul moyen d’avoir des réseaux de câbles qui puissent devenir productifs à un moment donné, en les constituant de telle façon que le trafic télégraphique créé par les nouvelles lignes ne soit plus détourné au bénéfice des lignes anglaises. C’est ce transit de la correspondance entre nos colonies et la France qui peut fournir la rémunération des nouvelles entreprises : il est naïf de l’abandonner aux entreprises rivales. C’est aussi à cette condition seulement que nous éviterons la domination anglaise, et que nous aurons entre les mains l’agent d’information et de défense qui nous est indispensable, surtout dans un moment où nous avons tant d’intérêts à surveiller en Chine, au Siam, à Madagascar, au Maroc et dans toute l’Afrique occidentale.

Il semble d’ailleurs que l’on doive, dans les circonstances actuelles et pour l’avenir, envisager la question des câbles avec une courageuse ampleur, si on veut la résoudre. Il existe aujourd’hui une lacune dans l’armement de la France pour la défense de ses intérêts dans les pays d’outre-mer, lacune qu’il faut combler sans perdre de temps, si l’on veut être prêt pour certaines éventualités menaçantes.

Il faut, par conséquent, se résoudre à procéder par mesures d’ensemble vigoureuses et rapides, comme on l’a fait lorsque des insuffisances ou des faiblesses ont été constatées dans nos arméniens, dans l’organisation de nos lignes de chemins de fer et dans la construction de nos navires. C’est à ce prix que nous pourrons regagner le temps si inutilement perdu depuis quelques années. L’étude et le choix d’un programme, dont l’exécution serait suivie avec la continuité de vues et la persévérance dont les Anglais nous donnent chaque jour l’exemple, seraient une chose