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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/407

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presque absolue, A perte de vue, des claires et de petits bassins entourés de chaussées ou « levadons » et communiquant tous entre eux. Sur tous ces levadons, des milliers de petites cabanes en planches ou en mauvaise maçonnerie, peintes en noir ou bitumées, couvertes de tuiles rouges, semblables à des pions disséminés sur un immense échiquier. Cela fait un paysage sans lignes, sans contours, sans plans successifs, sans variété, plat, vulgaire, rappelant les plus tristes et les plus monotones terres basses de la Hollande, sous un ciel presque toujours brumeux, dans une atmosphère humide et salée. De distance en distance glissent silencieusement les mâts et les vergues des embarcations engagées sur les chenaux, sans qu’on puisse apercevoir le corps du navire masqué derrière les levadons. Le moindre accident sur cette plaine marécageuse fait saillie ; et le plus remarquable est le magnifique clocher gothique de Marennes, haut de plus de 80 mètres, qu’on aperçoit de près de 10 lieues, et qui a servi, qui sort encore d’amer pour tous les navires engagés dans la baie de la Seudre et dans les parages d’Oléron.

Les communications de la grande île avec le continent sont d’ailleurs fréquentes et tendent tous les jours à augmenter. Un service régulier a lieu tous les jours entre le port du Château, situé au Sud d’Oléron, et la Rochelle, à travers le pertuis d’Antioche et le golfe de la Charente, qui présente en général de très bonnes conditions de navigabilité. Mais le point de la côte le mieux indiqué pour l’établissement régulier de ces communications est la pointe de Marennes, ou, pour parler comme il y a peu de temps encore, « l’île de Marennes. » Le port du Chapus, qui date de la fin du XVIIe siècle, forme au Nord même de la lagune de Marennes un petit promontoire distant à peine de 3 kilomètres du port du Château, situé au Sud d’Oléron, et un va-et-vient continu est organisé entre le continent et l’île qui en est à peine détachée.

A certaines heures du jour, vue d’un peu loin et d’un certain côté, l’île d’Oléron semble encore lui appartenir, et elle se présente comme un mince promontoire très avancé au large. Sa longueur est d’une trentaine de kilomètres, sa largeur varie de 4 à 10 ; mais les vagues ne cessent de l’entamer partout où elle n’est pas spécialement défendue par des ouvrages protecteurs. Il est certain que, malgré le soulèvement général de toute la côte, elle a beaucoup diminué depuis l’origine de notre dernière période géologique, et il est probable qu’elle diminuera encore.