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Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/408

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Les rochers d’Antioche, qui forment aujourd’hui au Nord de l’île un petit groupe d’écueils très avancés en mer, lui étaient autrefois soudés. Leur nom rappelle la ville un peu légendaire d’Antioche, qui existait, paraît-il, au moyen âge, non dans l’île même d’Oléron, mais en face, dans l’île de Ré, et dont on n’a retrouvé que des ruines et des souvenirs un peu douteux, mais qui ont suffi pour combler de joie les archéologues et pour donner leur nom au grand pertuis qui sépare les deux îles du golfe de la Charente.

A l’époque romaine, au moyen âge et jusqu’à ces derniers temps, l’île d’Oléron était considérée comme un poste militaire très important, et on y retrouve des débris de fortifications de tous les âges. Elle continue à être très peuplée, mais ne présente qu’un intérêt secondaire pour la défense nationale. Cinq petits ports sont échelonnés sur le pourtour de l’île : le Château, la Perrotine, le Douhet, Saint-Denis et la Cotinière. Le plus vivant est celui du Château, dont l’avant-port, le port d’échouage, le petit bassin à flot, les deux bassins de retenue et le gril de carénage constituent un ensemble très complet qui satisfait, et au-delà, à tous les besoins locaux. La petite ville de Port-Château, avec sa citadelle de Vauban et ses fortifications un peu inutiles aujourd’hui, présente un certain caractère et est le centre de tout le mouvement commercial du pays.

Les anciennes îles d’Arvert et de Marennes ont été, nous l’avons dit, définitivement soudées à la terre ferme et paraissent lui appartenir désormais. L’île d’Oléron, au contraire, qui a fait autrefois partie du continent et en a été brusquement séparée, lui reviendra-t-elle un jour ? Le lent soulèvement de la côte de Saintonge provoquera-t-il une nouvelle soudure, et le pertuis de Maumusson redeviendra-t-il un simple gué ou même un isthme complètement émergé ? C’est le secret des temps. Tout ce que l’on peut constater, c’est que la topographie des lieux a notablement changé depuis l’origine des temps historiques. On ne s’embarque plus pour aller « en Arvert » ou « en Marennes, » et les montagnes n’y « marchent » plus comme elles le faisaient encore il y a cent ans à peine. Mais Maumusson « tire » et « grogne » toujours, et il faudra peut-être bien des siècles pour que la grande île soit de nouveau rattachée au continent qu’elle a abandonné.