Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 157.djvu/515

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les réclamations des Uitlanders, serait obligé de les appuyer au besoin par la force[1]. »

Toutefois, il est évident que de repousser les sophismes de M. Chamberlain, ce n’est pas encore dire que la loi transvaalienne n’ait pas eu tort. Pour juger de la valeur intrinsèque de cette loi, il faut avoir recours à l’étude du droit comparé, quand les cas sont semblables, et à l’étude des principes mêmes de la naturalisation, s’il y a hétérogénéité. Ce que l’Angleterre exigeait avait trait, on se le rappelle, à la grande, non à la petite naturalisation, car, dès l’origine, le but poursuivi fut d’assurer aux Uitlanders les droits d’électorat et d’éligibilité pour le premier Volksraad. Or, quelles sont les conditions auxquelles ce droit est assujetti, par exemple en Belgique ? L’article 2 de la loi du 6 août 1881 statue que, pour obtenir la grande naturalisation, un veuf ou un célibataire doit avoir atteint sa cinquantième année et justifier d’une résidence continuelle de quinze ans. Les étrangers mariés et ceux qui sont pères de famille en sont quittes avec l’âge de vingt-cinq ans et une résidence ininterrompue de dix ans[2]. La Roumanie exige une résidence de dix ans continus après l’introduction de la demande[3]. Les Boers, au contraire, se sont contentés d’une résidence de trois ans dans l’Etat libre[4], et, dans la République Sud-Africaine, d’une résidence de deux ans révolus[5]. Et voilà donc leur manque de civilisation ! Plus tard, sans doute au Transvaal, en face d’une invasion cosmopolite très inquiétante, on a exigé une résidence de quatorze ans, mais ce dernier chiffre même restait au-dessous de la loi belge ; et, à la conférence de Bloemfontein, M. Krüger n’hésita pas à réduire ces quatorze années à sept ans seulement[6] proposition acceptée par le Volksraad, et élargie même dans un sens rétroactif. Voyons maintenant ce que fait en cette matière l’Angleterre elle-même.

Il est bien vrai que le paragraphe 7 du Bill du 12 mai 1870 ouvre la possibilité d’obtenir les droits civiques après une résidence de cinq ans, mais le même paragraphe attribue au secrétaire d’Etat le droit absolu et sans appel de la refuser sans aucune

  1. Livre Bleu, c. 9521, p. 15. «… if necessary to press them by force. »
  2. Loi du 26 juin, art. 8, 5 b.
  3. Loi de 1866, 1884, 51.
  4. Constitutie, sectie, 1, art. 1 D.
  5. West van 1890, n 5, art 1 D,
  6. Livre Vert, n. 4. 1899, p. 30.