constitue la véritable richesse. Ce sous-sol est formé d’une couche épaisse de tourbe qui n’est sans doute pas absolument inépuisable, mais qu’une exploitation plusieurs fois séculaire n’a pas encore sérieusement appauvrie. Il est certain que la rivière a été en partie occupée autrefois par une grande forêt dont les troncs d’arbre, — presque tous des chênes et des bouleaux, — de dimensions souvent colossales, quelquefois pourvus encore de leurs branches principales et de leurs racines, se retrouvent à quelques mètres au-dessous du sol, assez nombreux pour être l’objet d’une exploitation très productive. Noirs comme du charbon, presque mous lorsqu’on vient de les exhumer, ils acquièrent rapidement à l’air une très grande dureté, deviennent un excellent bois de chauffage et peuvent même être employés à tous les ouvrages de charpente. La forêt primitive a été en partie détruite, à l’origine de notre époque géologique, par les irruptions de la mer entre Saint-Nazaire et Montoir, en partie étouffée par l’accumulation des plantes spongieuses qui se sont développées sur le sol noyé. Elle s’est transformée en tourbière, et cette tourbière est ingénieusement desséchée après tous les hivers par une série de roubines ou d’étiers dont le principal est l’étier de Méan, qui est le grand collecteur de toute la région.
Cet étier de Méan, qui débouche aujourd’hui en Loire, un peu en amont de Saint-Nazaire, porte aussi le nom de rivière du Brivet ; et, dans son cours inférieur, ce Brivet paraît avoir éprouvé, depuis l’époque romaine, une déviation assez sensible. Il est probable que ses eaux s’écoulaient alors directement à la mer au nord de Guérande ; et c’est à peu près là qu’on a souvent placé l’ancien port que Ptolémée désignait sous le nom de Brivates Portus et qui semble bien avoir donné son nom au Brivet moderne[1].
Les géographes ne sont pas tout à fait d’accord sur son tracé exact ; mais tous s’accordent pour placer son embouchure en un point quelconque de la rive, dans cette grande échancrure de la Loire, qui constitue aujourd’hui la Grande-Brière, et estiment qu’elle devait se trouver soit aux abords immédiats de Saint-Nazaire sur le fleuve même, soit un peu au nord de Guérande, dans le chenal qui faisait communiquer alors avec l’Océan les eaux du golfe aujourd’hui presque colmaté, souvent à sec et peut-être légèrement surexhaussé. Ce qui est tout à fait certain, c’est qu’à l’époque de
- ↑ μετὰ τὰς τοῦ Αἰγειρος ποταμοῦ ἐϰϐολὰς, Βριουάτης λιμὴν 17° 40’— 48° 45’. Ptol., Geog., l. II, ch. VII.