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avant cette multiplication, efficace sur le papier seulement et désastreuse dans la pratique.

Pour servir beaucoup de canons, il faut beaucoup de pointeurs, et le pointeur d’un canon de gros calibre, tirant, comme c’est possible, deux coups en trois minutes, pendant une période ininterrompue d’un combat (7 à 8 minutes environ), est un oiseau rare, dont la rencontre et l’éducation ne sont pas faciles. On nous objectera : « Pour le réglage même, il nous faut beaucoup de coups tirés avec beaucoup de canons. » Nous répondrons : « Rien n’est moins exact ; pour le réglage, il vous faut peu de coups, tirés aussi rapidement que possible, par un même canon, afin qu’ils soient comparables les uns aux autres. »

En résumé, nous pensons que l’armement des plus grands cuirassés devrait comprendre :

2 canons de gros calibre, très mobiles, ayant une grande amplitude de tir par le travers, très bien protégés, pourvus de moyens de chargement tels que l’intervalle entre deux coups, dans la période décisive du combat, puisse être réduit au minimum réalisable ;

8 canons de 164,7, pas protégés, libres de leurs mouvemens, à tir rapide, et bons pour perforer tous les blindages légers et beaucoup de cuirasses de flottaison et de tourelle ;

Des canons de 47, destinés à agir contre les torpilleurs ou contre les croiseurs et les paquebots armés en guerre ;

Des canons de 37, à tir rapide, ou automatiques, excellens pour faire pénétrer des obus suffisamment offensifs contre le personnel et le matériel, par tous les vides, embrasures, panneaux, etc., que présenteront toujours les navires de combat.

Ainsi armé, construit de façon à évoluer rapidement et à avoir une grande stabilité de plate-forme, plutôt que pour faire preuve d’une grande vitesse et enregistrer un grand rayon d’action, fait en un mot pour combattre sérieusement et non pour faire du bruit et se dérober au combat, le cuirassé pourra ne pas comporter plus de 11 à 12 000 tonnes et s’engager dans la lutte, avec avantage, contre des adversaires plus gros, plus coûteux et nominalement plus puissans que lui.

Enfin il faut se hâter de construire des transports ; et comme le prix en est relativement faible, sans fixer aucun chiffre, on pourrait espérer en avoir bientôt un nombre suffisant pour l’objet qu’on se propose.