à la mort, comblant ses sauveurs, l’honneur de l’armée, comme il les appelle, des témoignages de sa reconnaissance. Ils acceptent effrontément, si bien que la compagnie B s’en va par escouades coucher, dans un état complet d’ébriété, à la salle de police.
Une histoire plus louche encore et qui frise l’escroquerie est celle du semblant de vente, — pour 350 roupies, — de Rip, le terrier de la colonelle, à une dame, que l’on peut, vu la couleur basanée de son teint, duper sans remords. Moyennant cette somme, elle reçoit un faux Rip, volé au sergent de la cantine et déguisé par les soins d’Ortheris, taxidermiste de profession. Mais tout cela n’est rien auprès de la scandaleuse incarnation en dieu Krishna de l’Irlandais Mulvaney.
A la suite d’aventures qui montrent la tendresse avec laquelle une administration paternelle traite les pauvres coolies dupés et battus, Mulvaney pénètre dans le temple de Bénarès. Pour cela, il se sert du palanquin d’une princesse hindoue, antique objet de grand prix, qu’il trouve moyen de vendre ensuite 434 roupies, en mettant à un brahme le couteau sur la gorge. Cette équipée le fait disparaître vingt-huit jours sans permission, mais son colonel a si grand besoin de lui pour former les recrues, qu’il accepte, en haussant les épaules, l’excuse peu vraisemblable qui lui est donnée : insolation suivie d’insensibilité. La forte somme s’évapore en bière, comme tous les gains, licites et autres, des soldats.
Sans doute on peut soupçonner de quelque vantardise Mulvaney, dont les histoires d’éléphans dépassent toutes les prouesses de Tartarin. Il grandit peut-être ses hauts faits, n’importe : on en retirerait la moitié que nous saurions encore à quoi nous en tenir sur la prétendue discipline de l’armée anglaise aux colonies. Elle n’a rien de commun, en tout cas, avec ce que nous appelons de ce nom dans l’armée française.
Quel officier chez nous n’arrêterait une rixe entre deux soldats par les moyens d’usage : leur mettre un fleuret dans la main, les accompagner sur le terrain, leur apprendre à faire, d’une querelle de charretier, une affaire d’honneur ? Il est vrai que le duel est interdit en Angleterre. On s’en tient donc au pugilat, que Kipling n’a pas peu contribué à exciter par des refrains féroces tels que Belts et Click.
Il faut se rappeler que le soldat anglais représente généralement la lie de la population. C’est Learoyd, je crois, qui fait cette remarque : « N’est-il pas drôle que les gens dévots, tout en