annonce à M. de Bismarck que 1 200 Français viennent d’être pris, dont un grand nombre de francs-tireurs : — Les francs-tireurs prisonniers ! Je ne conçois pas cela ; on devrait les fusiller les uns après les autres, dit le Chef[1]. » De même pour les garibaldiens ; peu importe le nombre, et 12 000 comme 1 200 : « Le bruit court que Garibaldi a été fait prisonnier avec 13 000 de ses chemises rouges. Le ministre fait observer : « Il serait vraiment fâcheux d’avoir fait prisonniers 13 000 francs-tireurs qui ne sont pas même Français !… Pourquoi donc ne pas les fusiller[2] ? » De même aussi pour les turcos : « Je voudrais que l’on mît aux arrêts tout soldat qui fait prisonnier un de ces drôles. Ce sont des brigands, il faut fusiller cela ! Le renard peut s’excuser en disant que sa nature est d’être ce qu’il est, mais ces gens-là, ce sont des monstres, des hommes dénaturés[3]. »
De même, bientôt, pour les soldats de l’armée régulière : « Le Chef exprima un vif regret de ce qu’il fallût encore faire des prisonniers et qu’on ne pût pas les fusiller tout de suite[4]. » « Nous avons fait plus de 1 600 prisonniers, dit Saldern, et les pertes des Français sont évaluées à 4 000 ou 5 000 hommes. — Oui, répond le Chef, — mais les prisonniers ne sont maintenant qu’un désavantage pour nous : c’est un surcroît de charges. Saldern, dans le cours de son récit, ayant raconté qu’un Français était venu tomber à dix pas d’une barrière défendue par nos fusils à aiguille, le Ministre dit : « Au moins celui-là était par terre[5] ! » Et de même enfin pour la population civile, coupable simplement de curiosité patriotique ; à Versailles, quand on attend une sortie de Paris : « Hier, le Chef a dit que nous ne devrions point tolérer la formation de groupes dans les rues au moment des combats ; les patrouilles devaient sommer les habitans de regagner leurs demeures, et tirer sur ceux qui feraient de la résistance[6]. »
Sur tout ce monde, non seulement il faut tirer, mais il faut tirer « avec plaisir. » Si M. de Bismarck a un reproche à adresser à ses Prussiens, c’est celui-ci : « Nos gens tirent au besoin, mais ne fusillent pas avec plaisir. » Ils ne brûlent ni ne pendent