La dentelle aux fuseaux fut longtemps l’industrie la plus florissante de la Basse-Normandie ; la fabrication s’en exerçait surtout dans le Calvados, où les marques de Caen et de Bayeux furent l’objet d’une faveur prolongée et légitime.
Dans ce seul département, on comptait, en 1851, 50 000 dentellières[1], et ce chiffre fut ensuite dépassé. Les salaires étaient très élevés : les enfans gagnaient de dix à quinze sous par jour, mais la moyenne des ouvrières faisaient des journées de deux francs ; il y en avait même qui atteignaient trois, quatre et jusqu’à cinq francs. En prenant donc comme salaire moyen le chiffre d’un franc, comme nombre de dentellières le minimum de 50 000 ; en admettant que ces femmes ne travaillassent que 265 jours par an, on constatera que la production dans le Calvados était au bas mot de 13 250 000 francs ; et, comme la matière première ne figure que pour un dixième dans le pourcentage du prix de revient, on peut dire que la dentelle faisait entrer chaque année douze millions dans ce seul département.
Cette industrie bienfaisante, très populaire et toute gracieuse était, par surcroît, éminemment moralisatrice et présentait les avantages sociaux les plus sérieux.
D’abord la nature même de ce travail se conciliait à merveille avec les obligations de la vie de famille et les occupations du
- ↑ Rapport de l’Exposition internationale de Londres, 1851.