pillage s’arrêtera-t-il devant le vote de la proposition Berthelot ? Nous le souhaitons : en tout cas, un effort honorable aura été fait dans ce sens, et rien n’interdit d’espérer qu’il n’aura pas été fait en vain.
M. Berthelot aurait voulu faire de sa réforme une loi, ce qui aurait été préférable ; mais, en fin de compte, on s’est contenté de l’insérer dans un article du règlement. Cette atténuation est due à l’intervention de M. Rouvier. Il a proposé à la Chambre de décider par voie réglementaire que, en ce qui touche la loi du budget, aucun amendement ou article additionnel tendant à augmenter les dépenses ne pourrait être déposé après les trois séances qui suivront la distribution du rapport dans lequel figure le chapitre visé. La proposition de M. Berthelot a un caractère plus général : elle porte qu’aucune proposition tendant, soit à des augmentations de traitemens, d’indemnités ou de pensions, soit à des créations de services, d’emplois, de pensions, ou à leur extension en dehors des limites prévues par les lois en vigueur, ne pourra être faite sous forme d’amendement ou d’article additionnel au budget. Ces deux propositions, qui n’ont rien de contradictoire et qui se complètent très heureusement l’une l’autre, ont été successivement votées. Elles opèrent toute une révolution dans nos mœurs budgétaires. La première supprime ou du moins atténue beaucoup un abus des plus malfaisans, celui qui consiste à introduire un amendement dans le budget à tous les momens de sa discussion. Les inconvéniens de cette manière d’opérer sautent aux yeux. De là tant de lois mal faites, qui sont sorties depuis quelques années de l’officine législative ; de là aussi tant de dépenses inconsidérées. M. Rouvier a pensé, et la Chambre a cru avec lui, que ces inconvéniens seraient diminués si le temps dans lequel les amendemens pourraient être présentés était strictement limité, et s’il précédait l’ouverture du débat. Alors, plus d’improvisations hâtives, plus de surprises, et, si on nous permet un mot qui n’est que trop exact, plus d’escamotages. C’est un grand point acquis. Toutefois, il aurait été regrettable que la Chambre s’en tînt là. En somme, pendant les trois jours qui suivront le dépôt d’un rapport, les auteurs d’amendemens un peu avisés auraient encore pu se donner carrière et dresser leurs pièges et leurs embûches. La proposition de M. Berthelot, qui a été éloquemment soutenue par M. Ribot, a porté plus loin ; elle est allée à la racine du mal, en décidant qu’il ne suffirait plus d’un amendement pour augmenter les dépenses, et qu’il faudrait un projet de loi spécial, distinct du budget, discuté et voté à part, et qui devrait dès lors, avant de se traduire en crédit, avoir été approuvé par les deux Chambres. A moins de supprimer