Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 159.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

appareils de destruction qu’ait produits le génie humain, s’élève maintenant la coupole du salut. Et l’on sent que cette forme est bien celle qui convenait ici. Au sommet d’une ville qui pyramide, ce n’est point un nouvel élan qu’il faut, mais un couronnement. Des plaines, il est bon que des flèches s’élancent vers le ciel comme une prière. Mais, sur les hauteurs, il est mieux que des coupoles recouvrent comme une bénédiction.

Ainsi, en nous promenant dans l’Exposition, nous ne chercherons pas dans quelque notion purement intellectuelle le signe de la beauté, mais seulement dans la sensation que nous fournira la décoration nouvelle, la « tache » heureuse ou malheureuse faite sur le Paris que nous connaissions par ce Paris nouveau qu’on vient de nous édifier.

Et nous ne demanderons même point les traits puissans d’une véritable architecture, c’est-à-dire d’un toit qui demeure et qui abrite des êtres vivans, à ces dômes et à ces clochetons dont le caractère est précisément de ne pas demeurer et de ne recouvrir que d’inertes choses. Il suffit qu’ils s’élancent dans l’air, et qu’ils plaisent, — comme le petit danseur antique, — une ou deux fois. De même, on ne peut exiger des lignes calmes, sobrement incurvées, faites pour être vues sans cesse et sans satiété, toute la vie. à ces palais faits pour surprendre, pour attirer une heure, et pour retomber en boue. Telle fantaisie rococo remplira ce but à merveille, qui serait insupportable à considérer sur nos places publiques durant des années. Et peut-être aussi qu’une longue suite de Parthénons, de Propylées ou de Temples de la Victoire Aptère, recouvriraient bien mal les salaisons et les tissus qu’il s’agit ici de faire valoir et orneraient bien sévèrement les champs de Grenelle ou du Gros-Caillou qu’il s’agit d’égayer.

Mais ce qu’on peut demander du moins à ces bâtisses, c’est la fantaisie des châteaux on Espagne, — et c’est la dernière chose, justement, que les architectes nous aient donnée. On est stupéfait de tant de science et de si peu de fantaisie, de tant de recherches et de si peu de trouvailles ! La science leur donnait les moyens de tout oser et l’autorité leur en donnait la licence. À quoi ont servi cette puissance et cette liberté ? À exagérer des formes connues, sans les enrichir, à traiter sur une immense échelle des motifs d’ébénisterie et de broderie, à surmonter les édifices de dômes ajourés comme des coquilles de rapières ou de claymores, selon des lignes hésitantes, un dessin mou, des intentions